Mourad Ouchichi, dans sa nouvelle analyse, met en évidence le «corps malade» de l'économie du pays et identifie les maux qui le gangrènent. L'ouvrage tant attendu est enfin dans les librairies : Les Fondements politiques de l'économie rentière en Algérie, de Mourad Ouchichi, publié par les éditions Déclic. C'est une belle rétrospective présentant un ensemble cohérent des facteurs qui ont engendré l'état rentier de l'économie algérienne. C'est une profonde réflexion sur l'évolution de l'état de santé de l'économie algérienne que nous propose Mourad Ouchichi, maître de conférences à la faculté de sciences économiques de l'université de Béjaïa. L'ouvrage est un travail de longue haleine qui a nécessité beaucoup de temps et d'énormes efforts, minutieusement cuisiné dans les labos de l'Institut d'études politiques (IEP) de Lyon (France), préfacé par Lahouari Addi, professeur de sociologie dans cet institut. Une nouvelle analyse, un nouveau diagnostic mettant sous les feux de la rampe le corps malade de l'économie du pays, l'identification des maux qui le gangrènent. Les Fondements politiques de l'économie rentière en Algérie a bien réussi à faire comprendre la cosmogonie du mal. L'ouvrage fait défiler les premières actions de volontarisme économique des années 1960 et 1970, les signaux et chocs des années 1980, leurs conséquences durement ressenties à la fin des années 1980 et durant les années 1990. Et, en appendice, l'on a droit à un parfait décryptage des secrets du suicide économique des années Bouteflika. Durant son règne, la prédation s'est imposée en seule loi économique. La construction économique était depuis toujours une recette qui n'a jamais été réussie. Les ingrédients choisis sont inappropriés ; le secteur public a été détourné de sa vocation économique, le clientélisme d'Etat a produit le gaspillage et la corruption, refus de la transparence et la liberté d'entreprendre, etc. En somme, l'ouvrage met à nu les paradoxes de l'économie algérienne et les forces prédatrices qui la tirent vers la banqueroute. Les obstacles sont bien listés. En conclusion, «l'économie algérienne n'obéit pas aux lois du marché mais elle est soumise aux injonctions administratives de l'Etat», écrit Mourad Ouchichi. La rente a étouffé dans l'œuf la moindre tentative vers le développement. Et c'est cette rente même qui renforce le régime dans son œuvre de faire du clientélisme la seule règle économique dans le pays. Le régime se renforce par la rente. L'émergence d'une économie productive et efficace chez le privé l'affaiblit, le menace et l'angoisse. C'est pourquoi, l'état rentier de l'économie sert bien ses calculs politiciens. Les Fondements politiques de l'économie rentière en Algérie apporte un bel éclaircissement de cette dangereuse dualité. «C'est parce que l'économique ne s'est pas émancipé du politique que la transition algérienne vers le marché n'a pas pu atteindre ses objectifs proclamés», conclut l'auteur.