D'abord quelques questions basiques pour faire atomiser les préjugés. Sous quel nom les Arabes désignent les chiffres arabes ? Croyez-vous que les Mille et Une Nuits ont duré 1001 nuits ? Savez-vous qu'il y a des centaines de mots français en arabe, tout comme il y a des centaines de mots arabes en français ? Henriette Walter et Bassam Baraké se proposent de répondre à ces questions et à bien d'autres dans leur livre Arabesques, Robert Laffont, éditions du Temps. Un livre ludique, créatif et étincelant. « Dans cet ouvrage, qui se voudrait à la fois sérieux et distrayant, c'est un peu l'histoire de l'Orient mêlée à celle de l'Occident que l'on découvre, mais sous un angle unique et très particulier, celui de deux langues lointaines par leurs origines, mais qui se sont croisées et influencées au hasard de l'histoire : l'arabe et le français », notent les auteurs en préambule. On s'instruit en s'amusant, et ce n'est pas inappréciable. Entre exposés savants et jeux linguistiques, c'est un peu la longue histoire des rencontres entre l'Orient et l'Occident que cet ouvrage retrace. Les deux langues n'ont pas eu le même parcours, la même histoire. « Alors que le français s'est développé de façon originale pour des raisons essentiellement politiques, l'arabe doit ses spécificités à l'histoire religieuse et à l'importance du Coran (…). L'attachement à ce livre culte s'est prolongé au cours des siècles auprès de toutes les populations islamisées, si bien que, malgré la diversification de la langue arabe au gré de l'expansion de l'Islam, le livre du Coran n'a jamais cessé de constituer un lien très fort entre tous les musulmans », constatent les deux linguistes. Autre particularité de la langue arabe est son évolution au contact des autres cultures. Cette langue, dès le Moyen-Age, s'est trouvée en contact avec les langues de l'Occident, lors de la fondation des dynasties andalouses en Espagne à partir du VIIIe siècle. Le livre s'amuse à retrouver les similitudes et les emprunts des deux langues. En ouvrant, au hasard, mot impropre puisque ce mot vient de la langue arabe Az-zahr, à la lettre « m », on sourit à mayo, ce n'est pas un diminutif de mayonnaise, mais bien un mot arabe qui désigne un maillot de corps dans plusieurs pays arabes. Pour la mayonnaise, si on est libanais on dira mayyonèz et si algérien, marocain ou tunisien, ce sera mayonéz. Tout est dans la prononciation. « Sur le plan des échanges linguistiques, si dès le Moyen-Age, l'arabe a beaucoup donné aux langues européennes, et au français en particulier, la tendance s'est inversée de façon très nette à partir du XVIIe siècle, comme on peut le remarquer dans les mots arabes venus du français, qui sont particulièrement fréquents dans les domaines de l'automobile, des produits de beauté, de l'alimentation et de la mode », concluent les auteurs.