-Docteur Makri, votre formation est partie prenante de la coordination de l'opposition. Pourquoi cette coordination ? Qui participera à la conférence nationale qui se tient aujourd'hui ? Les motifs de cette conférence sont nettement mentionnés dans sa plateforme. Nous considérons que l'Algérie connaît une crise multidimensionnelle qui va en s'aggravant. La non-gouvernance, la corruption, l'échec de la politique de développement, la mauvaise gestion des problèmes sociaux exposent le pays à des dangers énormes qui peuvent aller jusqu'à la désintégration du tissu social et même mettre, à terme, l'unité du pays en péril. Tout cela est bien entendu dû à l'absence de démocratie, l'impossibilité de la séparation des pouvoirs, l'impossibilité du contrôle et la non-transparence dans la gestion des affaires publiques et la fermeture du champ des libertés empêchant une véritable participation citoyenne. La fraude électorale entretenue d'une façon permanente, structurelle et systématique a saccagé les acquis de l'ouverture politique survenue après les événements du 5 Octobre et a foulé aux pieds les sacrifices des Algériennes et des Algériens lors de la crise nationale des années 1990 en donnant des institutions dénuées de toute crédibilité. Il est impératif de changer cette situation. Cette conférence propose une issue par une transition démocratique inclusive dans la paix et le dialogue avec toutes les parties et, en premier lieu, avec le système politique en place. -L'idée d'une période de transition n'est pas perçue de la même manière que l'on soit dans l'opposition ou dans le pouvoir. Ce dernier ne veut même pas reconnaître qu'il y a une crise. Comment allez-vous faire pour pousser le système à composer avec vous ? Allez-vous, par exemple, initier des actions de rue ? Le pouvoir en place est fidèle à lui-même, il n'est pas de ses habitudes d'écouter la voix des autres. Il ne reconnaît jamais ses carences. Tous les experts économiques, même les siens et ses institutions spécialisées, parlent d'un échec flagrant de sa politique économique après avoir investi pendant 15 ans l'équivalent de 700 milliards de dollars ponctionnés du patrimoine énergétique limité des Algériens et des générations futures. Cela revient à une incompétence sans appel ou à un égoïsme antipatriotique flagrant. Le pouvoir politique n'est pas conscient que même si les rapports de forces actuels lui conviennent, le temps ne travaille pas en sa faveur. La crise va fatalement s'accentuer s'il n'accepte pas le changement et c'est lui-même qui va se trouver de plus en plus en difficulté. Notre rôle en tant qu'opposition et de prévenir, d'éveiller les esprits, d'empêcher l'effondrement du pays en préparant une classe politique crédible, efficace, expérimentée, proche des citoyens, capable de mobiliser, de travailler ensemble et de prendre ses responsabilités en toute circonstance pour l'intérêt de l'Algérie et de tous les Algériens. Tous les moyens pacifiques, qui aideront à ces finalités, sont envisageables dans la concertation entre les partis et au sein des institutions de ces partis. -La coordination compte des partis de différentes obédiences. Le votre, le MSP, est-il prêt à faire des concessions sur le plan idéologique comme l'a fait Ennahdha en Tunisie ? La plateforme approuvée au niveau de la coordination (par ces partis de différentes obédiences) détermine le cadre général rassembleur. Nous sommes donc en avance par rapport à l'expérience tunisienne. Nous nous sommes rassemblés avant qu'une crise globale nous y oblige et nous nous sommes mis d'accord sur les principes, les règles, les objectifs, les mécanismes et les critères de la transition démocratique que nous voulons.Tous les partis politiques sont conscients des concessions qu'ils doivent faire pour leur pays. En ce qui concerne les questions idéologiques votre interrogation demande plus de précision. De toutes les façons la nature idéologique de l'Etat que nous voulons tous est déterminée dans la plateforme, dans le volet consacré aux principes et règles.