Le président de la République vient de signer le retour du service d'investigation judiciaire du DRS, qu'il avait pourtant dissous l'été dernier dans des conditions troublantes. Mis sous la surveillance du procureur général et sous le contrôle de la chambre d'accusation, il n'a plus les prérogatives d'enquêter sur la corruption. Ses missions s'arrêtent aux affaires de sécurité de l'Etat, de criminalité organisée et de terrorisme. Après avoir dissous, il y a presque une année, le service des enquêtes judiciaires du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le président de la République a signé, le 11 juin dernier, un décret présidentiel (14-183) portant création de la même structure auprès de la Direction de la sécurité intérieure (DSI) relevant du DRS. Publié dans le Journal officiel du 14 juin, ce décret définit et organise les nouvelles missions de ce service qui s'est illustré, après sa création en 2006, par de nombreuses enquêtes sur la corruption ciblant de gros dossiers comme, entre autres Sonatrach et les travaux publics, impliquant l'entourage le plus proche du Président. La nouvelle structuration a certes recadré les missions de ce service en le mettant sous la surveillance du procureur général et sous le contrôle de la chambre d'accusation. Cependant, comme il fallait s'y attendre, elle lui a ôté les prérogatives de traiter les affaires économiques liées à la corruption, ce cancer qui ronge l'Algérie. Aujourd'hui, ses missions se résument en la finalisation «des procédures judiciaires indispensables au recueil des preuves morales et matérielles inhérentes aux crimes et délits en relation avec la sécurité du territoire, le terrorisme, la subversion, le crime organisé». Et l'article 10 de ce décret «prohibe toute intervention initiée en dehors de des missions dictées et attributions conférées à cette structure». En vertu de ce décret, le service des enquêtes judiciaires «concourt aussi à la prévention et la répression de toute forme d'ingérence étrangère et contribue à la prévention et la répression des actes de terrorisme ou portant atteinte à la sécurité de l'Etat, à l'intégrité du territoire ou à la préservation des institutions de l'Etat, à la prévention et la neutralisation de toute action subversive et hostile dirigée contre les institutions de l'Etat. Il participe aussi à la répression des activités menées par des organisations criminelles internationales visant à affecter la sécurité nationale, la prévention, la répression de la criminalité liée aux nouvelles technologies de l'information et de la communication». Pour ce qui est de la mise en œuvre de l'action de la police judiciaire au titre des compétences du service, elle reste, selon l'article 9 de ce décret, «subordonnée aux autorisations nécessaires délivrées par les autorités judiciaires compétentes». Le service dispose de démembrements régionaux et de brigades d'investigation judiciaire mobiles pour exécuter «conformément à la loi» les délégations et réquisitions des juridictions et traiter les dossiers d'entraide judiciaire.Dirigé par un officier supérieur, son organisation interne ainsi que les attributions de ses composantes sont fixées par le général Toufik, patron du DRS. Force est de constater qu'au-delà du fait que les missions de cette structure soient mises sous le contrôle de la justice et plus précisément d'un magistrat civil, ce qui est en soi une revendication générale, la dissolution de ce service, il y a une année, n'aurait répondu qu'au souci de stopper les enquêtes sur la corruption. Celles-ci donnaient une mauvaise image d'un clan présidentiel qui faisait le forcing pour un quatrième mandat. Aujourd'hui, on s'interroge encore une fois sur le sort de ces dossiers qui croupissent dans les bureaux des juges depuis plusieurs années, oubliant qu'au moment où des justiciables sont maintenus en détention depuis des années, les privilégiés du système bénéficient de l'impunité.