Abderrahmane Faredheb était docteur d'Etat à l'université d'Oran. Il consacra toute sa vie à ses étudiants pour lesquels il voulait un pays libre, prospère et moderne. Il fut assassiné pour ses idées à Oran, le 26 septembre 1994. Sa fille Amel nous rappelle ce que fut un homme aux qualités exceptionnelles. Dix années que tu n'es plus, dix années que tu es parti prématurément, dix années qu'on t'a arraché à la vie que tu aimais tant. « Dix ans déjà » diraient certains, mais pas pour moi, pas pour nous ta petite famille. Ce sont dix longues années ou tu n'as cessé de nous manquer. Pour beaucoup, tu as été un être exceptionnel, mais pour quelques heures, quelques jours, le tant que se tarissent les pleurs. Hé oui, l'être humain a une mémoire très courte. Pour moi, pour nous et pour tous ceux qui t'aimaient, tu demeures un être exceptionnel pour toujours et tu n'as jamais été aussi vivant que depuis ce jour-la... Bien des choses ont changé en dix années. Cette Algérie pour laquelle tu nourrissais un idéal de paix, de fraternité et d'ouverture au monde est restée debout mais beaucoup, comme toi, ont payé de leur vie. Aujourd'hui, avec la « concorde civile », on a décrété qu'il fallait tout oublier et effacer ces quelques lignes qui appartient pourtant à l'histoire de l'Algérie. Pour nous et pour toutes les familles victimes du terrorisme, ceci est une trahison, une grande peine, une autre douleur à vivre et à apprivoiser. Faut-il oublier tous ces enfants, ces femmes, ces hommes, tous, comme toi, lâchement assassinés pour avoir choisi de dire non à l'obscurantisme, ou tout simplement pour avoir existé. On m'a souvent dit, sans gêne ni scrupules, qu'il fallait oublier pour avancer. Mais ces gens ne pourront jamais ressentir ce que je ressens, ce que ressentent mon frère et ma mère et ces milliers de personnes dans notre cas. Ils ne sauront jamais ce qu'est ce vide laissé et qui ne se comblera jamais, ce manque terrible et insurmontable, cette absence qui nous mine au quotidien...Comment supporter cet horrible supplice, celui de vivre et de côtoyer chaque jour ceux qui sont la cause de notre malheur. Ces crimes seront-ils un jour jugés, et cette page de notre histoire écrite ? Qui pourrait remplacer ce père que tu étais pour nous, ce pilier de la famille, la force, la sécurité ? Tu étais notre référence, nos repères. Tu nous aurais conseillé dans nos études, on aurait eu de grandes discussions comme tu aimais en avoir. Mais on a dû faire un chemin sans toi, et heureusement que maman a été assez forte pour prendre la relève. Aujourd'hui, tu serais fier de nous, de ce que l'on a réussi à accomplir, hélas sans toi. Ton combat était juste, c'était celui de la générosité, de la fraternité, celui de l'homme honnête et humaniste que tu étais. Pour moi ta fille et pour nous ta petite famille, tu n'as jamais été aussi présent que dans ton absence. Ta petite famille : Amel, Mourad, Zokha et ton gendre qui aurait tellement aimé te connaître, toi le grand homme que tu étais