Depuis l'installation officielle hier à Tobrouk de la Chambre des députés, issue des élections du 25 juin dernier, la communauté internationale ne cesse de lui exprimer son soutien. Mais les Libyens doutent de la capacité des nouveaux élus à arrêter le spectre de la violence. Malgré la tenue des assises de la nouvelle Chambre des députés à Tobrouk, l'attention des Libyens est plutôt dirigée vers Washington et Tripoli. La capitale américaine abrite des réunions entre le Chef du gouvernement libyen intérimaire, Abdallah Thaney, et les autorités américaines. Abdallah Thanay, chef du gouvernement libyen par intérim, a demandé aux Américains d'aider la transition démocratique en Libye. «Le peuple libyen a fait son choix à travers les urnes. Mais il y a des hors-la-loi qui empêchent les institutions légitimes de fonctionner. C'est pourquoi les autorités demandent à la communauté internationale d'intervenir pour protéger les civils», a-t-il expressément demandé. Les Américains ont donné une réponse très vague à cette requête. «Nous sommes contre la violence en Libye et favorables au respect des décisions de la Chambre des députés. Nous exprimons également notre soutien au travail de la commission constitutionnelle, qui est à la base de la réussite de la transition démocratique dans ce pays», a notamment souligné le secrétaire d'Etat John Kerry, après sa rencontre avec Thaneï. Le chef du gouvernement libyen a également rencontré, à Washington, Susan Rice (ancienne représentante américaine à l'ONU) et Déborah Jones (ambassadrice américaine à Tripoli), qui vient de plier bagage en raison de la détérioration sécuritaire en Libye. Il ressort de ces pourparlers en coulisses que les Américains sont plutôt pour un dialogue national élargi à tous les belligérants de la scène politique libyenne, afin de parvenir à un gouvernement d'union nationale qui appliquerait les recommandations de la nouvelle Chambre des députés. «Washington tient à sa proposition de conférence nationale prévue initialement les 18 et 19 juin, soit avant les élections du 25 juin», précise une source de la délégation libyenne. «Les Américains ne voient pas d'issue sans la présence des islamistes autour de la table. Lesquels islamistes sont très forts sur le terrain militaire avec les milices de Misrata. Or, à la réunion de la Chambre des députés à Toubrouk, les islamistes étaient absents», ajoute la même source. A part Washington, les Libyens lorgnent aussi du côté de Tripoli, où les combats font toujours rage depuis le 13 juillet entre les milices islamistes associées au nom de la ville de Misrata et celles proches de la ville de Zentane, dans ce qui est couramment appelé «la bataille de l'aéroport». «L'issue de cette bataille déterminera le sort de l'équilibre politique en Libye», pense l'ex-membre du Conseil national de transition, Mansour Younes. «Mais vu l'importance symbolique de cette bataille, personne ne veut faire de concession et les positions des belligérants n'ont pas évolué depuis plus de trois semaines de combats», ajoute l'expert. «Or, l'issue en Libye ne saurait être que consensuelle en cette phase de transition», conclut l'universitaire d'un ton assez pessimiste. En même temps, la Chambre des députés issue des élections du 25 juin a tenu avant-hier sa première réunion à Tobrouk, sur les frontières égyptiennes, en présence de 173 des 188 élus. 15 députés islamistes, notamment de Misrata, ont boycotté la séance d'ouverture. Les députés présents ont procédé à l'élection du bureau de la Chambre. Ils ont ainsi élu Aguila Salah Aïssa d'El Gobba (Est) comme président et Mohamed Ali Cheaïb d'Ezzaouia (Ouest) comme premier vice-président. La Chambre des députés continuera pendant les prochains jours à mettre en place les structures et la législation nécessaire à son fonctionnement. Malgré le soutien international déclaré à cette Chambre à travers le communiqué commun de l'Italie, la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et les USA, les Libyens doutent de l'efficacité de cette instance sur le terrain, surtout après l'intervention du président du Congrès national général sortant, Nouri Bousahmine, qui a indiqué que «la réunion de Tobrouk est en opposition avec la ‘‘petite'' Constitution sur les questions de celui qui a lancé la convocation à la réunion, son lieu et la représentativité du Congrès national général». Les Libyens sont encore à la recherche de ce qui peut les réunir, alors que la communauté internationale continue à observer... passivement.