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Tourisme : Ces enfants qui n'ont pas droit aux vacances
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Publié dans El Watan le 13 - 08 - 2014

«Plus de 70% des centres de vacances gérés depuis les années 1970 par les œuvres sociales sont allouées à des entreprises qui ont fait faillite. Ils sont fermés et déserts.»
Il y a ceux qui passent des heures à chercher une destination sur les sites de voyages, des heures à hésiter sur le bon hôtel à prendre, à faire des calculs pour trouver les bonnes dates de départ et de retour. Il y a ceux qui changent de ville pour louer des bungalows sur une des plages qui jalonnent nos 1200 km de côte.
Et il y a ceux, beaucoup plus nombreux, qui ne peuvent s'offrir ni l'un ni l'autre. Contraints de rester chez eux, ils font avec les moyens du bord pour se divertir en ce mois d'août harassant de chaleur. Se prélasser au bord de l'eau, se détendre sous le soleil, s'adonner à des activités de loisirs pieds dans l'eau est un luxe que les Algériens ont de plus en plus de mal à s'offrir. Les colonies de vacances se font rares et les centres de vacances n'ouvrent pas toutes leurs portes.
«Plus de 70% des centres de vacances, gérés depuis les années 1970 par les œuvres sociales, sont alloués à des entreprises qui ont fait faillite. Ils sont fermés et déserts», explique Mourad Kezzar, consultant en management hôtelier et touristique. «La situation s'aggrave et les enfants sont les premiers à en pâtir.» Ils représentent près de 28% de la population et peu d'entre eux ont droit à de vraies vacances.
Des vacances à Jijel pour 10 fois le SMIG
Dans l'Algérois, ils ont le choix entre une cinquantaine de plages et quelques piscines (elles se comptent sur les doigts d'une main) qu'il n'est pas toujours facile de rejoindre faute de transport. Mais pas seulement. «Nos plages sont de moins en moins plaisantes. Elles sont gérées par des petits jeunes qui ne savent rien du métier, ça donne un effet d'anarchie», explique Djallal, la quarantaine, cadre dans une entreprise privée.
«Cette année, je suis allé dans une résidence à Béjaïa», ajoute cet Algérois qui, pour la quatrième année consécutive, boude les plages algéroises. Les deux journées de plage qu'il s'est offert avec sa femme et sa fille lui ont coûté… 20 000 DA ! «J'en ai eu pour 14 000 DA de location et le reste pour manger, on a profité de la mer. Je ne peux pas m'offrir plus, c'est beaucoup trop cher.» Pour lui, les vacances ont duré un week-end.
Nager dans les fontaines publiques
La demande est forte, mais l'offre est loin de contenter les attentes. Nos sites balnéaires sont hors de prix. Quelles sont les formules de vacances proposées aux familles nécessiteuses (plus d'un million selon les statistiques officielles) ? La réponse est simple : rien qui puisse contenter leurs petites bourses.
Petit illustration : l'agence de voyages Touring voyages Algérie a élaboré un programme de vacances dans des villes côtières de Aïn Témouchent, Boumerdès et Jijel. Les tarifs de location d'un chalet varient entre 6000 et 8000 DA/jour. Soit 42 000 DA pour une semaine, près de 170 000 DA pour un mois. Pour s'offrir ne serait-ce que deux semaines de vacances, un couple avec deux enfants aurait besoin de plus de cinq fois le SMIG, sans compter les frais de restauration et de loisirs, quand loisir il y a.
La réalité est amère, il n'y a pas que les familles nécessiteuses qui ont du mal à se payer des vacances en Algérie. En fait, le tourisme local est loin d'être intéressant, raison pour laquelle les agences de voyages font de moins en moins de propositions. Manque d'infrastructures, tarifs trop élevés. «Je me serre la ceinture toute l'année pour pouvoir louer un appartement à Béjaïa, au bord de la mer, pour 250 000 DA le mois en été», dit Saïd, un père de trois enfants ne roule pas pour autant sur l'or.
Cet enseignant a trouvé la bonne parade pour offrir des vacances à sa femme et ses enfants : «J'occupe l'appartement, un F3, avec deux autres familles, chacune prend une chambre, ça nous coûte moins cher et tout le monde s'amuse.» Bien qu'il perde en confort, il économise plus de 100 000 DA grâce à ce deal.
L'essentiel, pour Saïd, est de voir ses enfants nager et profiter de la mer. Ceux qui n'ont pas cette chance se rabattent sur les fontaines publiques, au mépris des règles d'hygiène et de sécurité. Ils pataugent, font clapoter l'eau et trouvent même le moyen de plonger. Comme ces adolescents qui nagent dans la fontaine publique de Bouchaoui, sur la photo. Les images en disent plus que les mots.


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