Une année à peine après son adoption, la loi sur les hydrocarbures refait parler d'elle. Les amendements apportés tout récemment par le gouvernement à cette loi ont fait resurgir une nouvelle fois le débat sur son opportunité et sa pertinence. L'on se rappelle tous l'atmosphère houleuse qui a accompagné l'annonce du texte de loi par l'un "des hommes proches" du président de la République, le ministre de l'Energie, Chakib Khelil, au début de 2001. L'UGTA représentée par sa fédération des pétroliers, le patronat et la classe politique, y compris le RND, se sont opposés publiquement au projet du ministre de l'Energie et des Mines et ont tous appelé au retrait pur et simple de la loi jugée "dangereuse" et comprometteuse des intérêts énergétiques du pays et du sort des générations futures. La contestation n'a pourtant, en rien, altéré la détermination des promoteurs de ladite loi. Pis, l'opposition s'est, curieusement, tassée au fil des mois pour finir en un total consentement en 2004, l'année des élections présidentielles. L'adoption de la loi en 2005 a été somme toute une formalité. La rapidité avec laquelle la loi a été expédiée par les deux chambres parlementaires frise le ridicule. Les quelques députés présents lors de la séance d'adoption ont préféré plutôt fermer l'œil et passé à autre chose. Mais voilà, au moment où l'on s'attendait à l'entrée en application de la loi, et à la surprise générale, le gouvernement adopte dans son Conseil du 4 juin dernier un avant-projet de texte législatif portant amendement de certaines dispositions de la loi 05-07 relative aux hydrocarbures. D'après le communiqué du Conseil de gouvernement, " les amendements proposés visent à rationaliser l'exploitation des ressources en hydrocarbures afin de répondre d'une part aux besoins induits par le développement national et de préserver d'autre part les richesses naturelles de notre pays au profit des générations futures ". Des amendements que le Conseil des ministres a avalisé à son tour la semaine dernière et qui concernent deux dispositions majeures. La première concerne la participation de Sonatrach. Dans la loi de juillet 2005, Sonatrach pouvait prendre une participation de 20 à 30% dans les contrats d'exploration et d'exploitation alors que dans le nouveau texte, elle est obligée de prendre un minimum de 51%. Un virage à 180° L'amendement concerne aussi le transport par oléoducs et gazoducs. Dans les concessions, Sonatrach est obligée également d'avoir 51%. Le deuxième amendement concerne l'instauration d'une taxe sur les profits exceptionnels des compagnies internationales et qui touche les contrats existants de la loi de 1986 négociés à un moment où les prix n'étaient pas aussi élevés. Il est prévu ainsi au titre des amendements une taxe sur ces contrats, dans la mesure où les prix restent au-dessus de 30 dollars le baril. Dans le cadre de la loi de juillet 2005, le système fiscal n'a pas changé puisque la fiscalité pétrolière se situe au niveau de 62%, tandis que pour la loi de 1986, il est à 48%. La nouvelle loi a été aménagée en tenant compte de la variation des prix sur les marchés internationaux. A titre de rappel, la loi sur les hydrocarbure de juillet 2005 " chère au ministre de l'énergie " remettait carrément en cause le système de partage de production de 51/49% et ce, dans l'objectif de libéraliser et d'ouvrir davantage le secteur des hydrocarbures aux compagnies étrangères. Ces dernières, dans le cas où elles faisaient des découvertes avaient droit à des contrats de production d'une durée de 30 ans et peuvent disposer d'un minimum de 70% des hydrocarbures découverts. Ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. D'aucuns qualifient ces amendements de virage à 180 degré des pouvoirs publics qui semblent en tous les cas prendre conscience des réels enjeux énergétiques. A une question sur l'origine de la révision de la loi, le ministre a déclaré lors de son passage à une émission radio : " Je peux vous dire que les amendements étaient à l'initiative du ministère de l'Energie". Quant aux facteurs qui ont motivé le changement, le ministre a cité les prix, le fait que les hydrocarbures vont devenir un produit rare et les perspectives assez intéressantes en matière de ressources financières qui ne justifient plus le fait d'exporter plus. Il sera plutôt question de raffiner et de transformer le pétrole et le gaz produits afin de les exporter en produits raffinés, a estimé le ministre. Toutes ces motivations n'avaient-elles pas droit de cité au moment de la discussion de la nouvelle loi ?