Le 21 août 1993, dans une Algérie gagnée par la folie meurtrière, fut assassiné, à bout portant, l'un des hommes les plus en vue de la classe politique algérienne depuis l'ère Boumediène. Kasdi Merbah, de son vrai nom Khalef Abdallah, tombait, en compagnie de son frère Abdelaziz, de son fils, Hakim, et de son chauffeur, Aït Mekidèche, et de son garde du corps. L'occasion est exploitée par les amis du défunt pour déposer une gerbe de fleurs sur sa tombe au cimetière El Alia. C'est ce qu'indiquent des communiqués venus notamment de sa famille et du parti qu'il avait créé, le MAJD. Ce 21e anniversaire de l'assassinat de celui qui fut longtemps chef de la Sécurité militaire est également une occasion pour sa famille de se poser des questions sur les conditions de cet acte. Après la mort de Abdallah Khalef, «l'enquête (…) a été bâclée, voire carrément viciée et détournée, si bien que très vite, nous avons assisté à l'interpellation de pauvres hères de la région aussi vite accusés de ce crime abject», écrivent trois sœurs de Merbah dans un communiqué de presse. Pis, les sœurs Khalef, qui n'en sont pas à leur première accusation, interpellent les responsables du pays. «Les dirigeants qui ont eu à exercer des responsabilités durant ces deux dernières décennies, à quelque niveau que ce soit, doivent savoir que nous ne renoncerons jamais à notre droit imprescriptible et surtout à notre devoir moral impérieux de revendiquer la vérité sur ce qui s'est réellement passé. Notre détermination est plus que jamais inébranlable», écrivent-elles encore. Les rédactrices du document expliquent que leur seule «exigence » est l'ouverture d'une «véritable enquête judiciaire», menée par des «juges d'instruction indépendants et intègres». Elles dénoncent «le concept éhonté et immoral énoncé par des pseudo-intellectuels proches du pouvoir, selon lequel ‘'la raison d'Etat doit prendre le pas sur la justice due à tout un chacun'', cela traduit une dérive extrêmement dangereuse (…)». Kasdi Merbah a été durant de longues années le patron de la très redoutable Sécurité militaire, les services secrets algériens. Il est le principal acteur qui a pesé de son poids pour l'arrivée au pouvoir de Chadli Bendjedid en 1979. Après avoir quitté l'armée en 1984, il devint ministre de l'Agriculture, puis premier chef de gouvernement après les émeutes d'Octobre 1988. En 1990, il bascule dans l'opposition et crée son propre parti, le Mouvement algérien pour la justice et le développement (MAJD). Il a été assassiné à Bordj El Bahri le 21 août 1993.