Vrai, qui n'aime pas son quartier n'aime pas sa ville, et qui n'aime pas sa ville n'aime pas son pays. «Mienne Casbah/Joyau de ma vie/Je sais l'amitié que tu éprouves à l'égard de la fidélité/Et les combats dans tes ruelles qui portent encore en eux la résonance de la liberté, paraissent plus propres au milieu de leur saleté/Cette saleté diabolique qui s'acoquine avec les agitations des gens avides d'argent et de gloutonnerie…». Sa vie a été une transcendance totale, précisément une série de transcendances. De la poésie lyrique, l'amour pour la femme, à sa passion pour La Casbah, à son amour pour la patrie, pour arriver à la spiritualité, à Dieu. Une quête ininterrompue en métaphysique, en soufisme. Amar Belkhodja poursuit le ou les chemins menant à cette figure haute en couleur, aux multiples facettes, qu'est Himoud Brahimi. Il nous montre dans le dernier livre à ce propos les différentes grandes étapes de l'évolution de Momo, son «univers poétique et spirituel». Momo, le recordman en plongée en apnée, Momo le poète, Momo l'acteur de cinéma et Momo le métaphysicien, le halladjien. Cette dernière étape-élévation a commencé, en 1951, par sa rencontre avec deux personnalités, Mohamed Gasbi, Marocain, «disciple reconnu de Mahieddine Ibn El Arabi» et Michel Valsan (Mustapha Abdelaziz), un diplomate roumain, qui se convertira à la religion musulmane et plongera dans le soufisme. Ce dernier lui conseillera le livre de René Guénon (Abdelouahed Yahia), professeur de mathématiques converti à l'Islam, intitulé La crise du monde moderne, publié en 1927. Un livre qui lui fera aboutir sa quête, avec bien sûr ses lectures antérieures du christianisme et du judaïsme et même de l'hindouisme. Si bien que sept ans après, soit en 1958, Momo écrira un essai métaphysique intitulé L'identité suprême, qui passera inaperçu, comme le film où il tenait le premier rôle, du réalisateur Tahar Hannache, Les plongeurs du désert. Forcément, il n'en pouvait qu'être ainsi, puisque l'Algérie était en pleine guerre de libération, alors que la France «refusait la mise en images» et ne daignait pas regarder du côté du «bicot». L'enquête de Amar Belkhodja auprès de la famille du défunt, de ses amis, nous éclaire sur les multiples talents de cette éminence, sur sa brillante intelligence et nous offre tant d'enrichissements. Momo déclame : «Le mensonge est brûlot qui use le cœur jusqu'à ce qu'il soit calciné…». Puis : «La seule vraie science en ce monde, c'est celle que le mortel a de son âme». Tahia, ya Didou !