L'insuffisance cardiaque chronique est aussi grave, voire plus, que le cancer. Considérée comme première cause de mortalité cardiovasculaire devant l'infarctus, l'insuffisance cardiaque constitue aujourd'hui un sérieux problème de santé publique, alertent les spécialistes. Elle évolue malheureusement dans l'indifférence et touche de plus en plus de personnes, dont le nombre va doubler d'ici 2020. Aucune enquête nationale n'a été réalisée à ce jour. Il y a donc une méconnaissance de la prévalence et même de la maladie en Algérie, ont déploré des cardiologues algériens lors d'une réunion autour du thème «L'insuffisance cardiaque chronique», organisée par le laboratoire Novartis. «Il est temps d'alerter les pouvoirs publics sur la gravité de cette maladie et la nécessité de la mise en place d'un programme pour sa prise en charge», a lancé le Pr Zannad, expert international. Pour lui, l'heure est grave. Revenant sur l'épidémiologie de la maladie dans le monde, le conférencier a souligné le caractère gravissime de cette pathologie qui est en progression et qui reste la première cause d'hospitalisation. Il la place en haut de l'échelle en la comparant au cancer du sein. «L'insuffisance cardiaque chronique est aussi grave, voire pire, qu'un cancer du sein en termes de morbidité et de mortalité et sur ce qu'elle peut engendrer comme coût et qualité de la vie. Il faut savoir qu'on peut guérir d'un cancer et non pas d'une insuffisance cardiaque», a-t-il encore souligné. Et d'exhorter les cardiologues à prendre au sérieux cette maladie en progression et tenter de stabiliser la courbe. «Chose possible, a-t-il indiqué, en mettant en place une vraie stratégie de prévention contre les facteurs de risque» qui sont, selon lui, connus et identifiés. Il déplore que 22% des patients souffrant d'insuffisance cardiaque meurent durant leur évacuation. «Un patient sur cinq n'arrive pas à l'hôpital. L'insuffisance cardiaque tue deux fois plus que l'infarctus du myocarde ou autre pathologie cardiovasculaire», a-t-il déploré. Une situation qui doit être sérieusement prise au sérieux et inciter à mettre en place des unités spécialisées. La lutte contre les facteurs de risque, comme l'hypertension artérielle (HTA) reste la solution, selon le Pr Zannad, car elle forme le lit de l'insuffisance cardique. «Ce sont ces patients hypertendus qu'il faut sérieusement suivre et tenter de stabiliser», a-t-il martelé. Ce qui permettra de réduire a-t-il signalé de 50% les AVC. «Les patients doivent être aussi suivis chez eux que ce soit par le médecin généraliste ou par le cardiologue. Les médecins doivent être tenus dans ces cas-là par l'obligation de résultat.» Des unités spécialisées pour l'insuffisance cardiaque dans les hôpitaux sont indispensables, a-t-il dit, tout en mettant en place une organisation de soins en réseau et les traitements avec les molécules innovantes qui ont beaucoup changé la vie des malades. «C'est grâce à toutes cette organisation qu'on a pu réduire, en Lorraine, dans le Nord-Est de la France de 40% les hospitalisations et économiser 5 millions d'euros par an», a-t-il précisé. Et d'appeler les praticiens à utiliser tous les outils en leur possession pour intervenir plutôt et surveiller les malades. «Les traitements doivent être réadaptés pour atteindre la cible et avoir de bons résultats. Il est question d'optimiser les doses», a-t-il recommandé. Il estime que l'insuffisance cardiaque, qui se présente sous plusieurs formes, doit être séquencée et à l'avenir chaque patient doit être traité selon sa pathologie, d'autant que l'innovation et les essais cliniques ne manquent pas. De leur côté, les médecins déplorent l'absence de données officielles sur la prévalence de cette maladie ainsi que le désintéressement des jeunes cardiologues à cette pathologie. Pourtant la maladie, a précisé le Pr Nibouche, chef de service à l'hôpital Parnet d'Alger, «est en nette progression» en Algérie et elle constitue un sérieux problème de santé publique : «L'insuffisance cardiaque est en augmentation inéluctable. Elle nécessite effectivement un programme, voire une stratégie nationale, qui reposera sur l'organisation des soins pour améliorer son pronostic. Les traitements médicamenteux ne suffisent pas. Il faut mettre en place une formation médicale continue, car cela ne relève pas seulement du cardiologue mais aussi du médecin généraliste, de l'interniste, du pneumologue et de la gériatrie. L'ouverture d'un service de gériatrie est aujourd'hui une priorité.» Fatigue extrême, œdème des chevilles, essoufflement à l'effort et au repos sont, entre autres, les symptômes de l'insuffisance cardiaque. On parle alors de défaillance du muscle cardiaque qui peut être due à de multiples causes dont les deux plus fréquentes sont la maladie coronaire (faisant notamment suite à un infarctus) et l'hypertension artérielle. D'autres facteurs ne sont pas à négliger, comme l'hypercholestérolémie, le tabagisme, le diabète et l'obésité, signalent les spécialistes.