La Turquie reconnaît que les frappes aériennes contre l'Etat islamique n'ont pas permis d'arrêter l'avancée de ce groupe terroriste à Kobané. Son ministre des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, plaide pour une stratégie globale. Paris De notre correspondant Washington continue de presser Ankara d'engager des troupes au sol et de permettre aux Kurdes bloqués de l'autre côté de la frontière de rejoindre les combattants qui luttent contre l'Etat islamique à l'intérieur de la vile syrienne de Kobané. Sauf que la Turquie ne l'entend pas de cette oreille. C'est ce qu'a dit en substance, hier, le ministre des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, qui refuse que son pays «arme des civils et leur demande de se battre contre des terroristes». «Envoyer des civils à la guerre, c'est un crime» a-t-il indiqué dans une interview exclusive accordée à France24. «La situation à Kobané est en fait un autre exemple de cette tragédie qui se produit en Syrie. Nous avons suivi la situation de très près et nous allons continuer notre aide humanitaire. Aussi, nous laissons toujours notre porte ouverte pour accueillir des kurdes syriens», a ajouté le ministre turc, qui s'est ensuite interrogé qui veut vraiment retourner à Kobané pour combattre alors que la population a fui cette ville. «La Turquie ne peut pas armer des civils et leur demander d'aller se battre contre des groupes terroristes. On ne peut pas risquer la vie de ces gens.» Le chef de la diplomatie turque plaide plutôt pour une stratégie globale et déterminée pour éradiquer l'EI de la région. Mevlut Cavusoglu a confirmé une fois de plus le refus de son pays à intervenir seul à Kobané pour ne pas créer, dit-il, une «tragédie supplémentaire dans la région». Le PKK, un groupe terroriste selon Ankara Concernant les frappes aériennes opérées par les Américains et leurs alliés européens et arabes, le ministre turc reconnaît qu'elles ont échoué et n'ont pas permis de mettre fin aux terroristes de l'Etat islamique. Même s'il estime que ces frappes ont modifié un petit peu la balance sur le terrain, elles n'ont, par contre, pas changé la donne. «Tuer les moustiques un par un, ce n'est pas la bonne stratégie. Il faut éradiquer les causes de cette situation. C'était vrai avec le régime Maliki en Irak et vrai avec le régime Assad en Syrie», a-t-il ajouté. M. Cavusoglu a insisté sur le nécessaire départ du régime de Bachar Al Assad, défendu, selon lui, par l'Iran et la Russie. Et de comparer ce régime, qui «a tué 200 000 personnes», à l'Etat islamique. «Il faut des forces terrestres pour mettre fin à l'Etat islamique et une politique globale car tant qu'Al Assad est au pouvoir, la région ne connaîtra pas la paix.» A la question de savoir qui enverrait des troupes au sol, le ministre des Affaires étrangères turc a répondu que son pays est prêt pour une telle option, à condition qu'elle soit «partagée par l'ensemble des alliés». Concernant le processus de négociation mené par le gouvernement turc et le PKK, Mevlut Cavusoglu a estimé que son pays continuera à négocier avec ce groupe, qu'il juge «terroriste». Et de conclure : «Si le PKK dépose complètement les armes, là on pourra envisager autre chose, sinon pour nous il reste toujours un groupe terroriste comme tous ces groupes qui se battent en Syrie.»