Tant de fois l'accent a été mis sur les gens qui viennent squatter des pans de terrain quelque part dans la périphérie d'Alger pour y ériger un gourbi… Sur les berges d'un oued, où la crue risque de les emporter, agglutinés sur un versant ou campant carrément sur un terrain vague qu'ils considèrent comme un bien beylick, ces squatters n' ont cure de mettre les pouvoirs publics devant le fait accompli. Obligeant l'Etat providence à se mettre martel en tête pour les déloger et les reloger dans quelque cité flambant neuve. Mais ces derniers mois, ce sont les citoyens qui sont mis devant le fait accompli. Des habitants pris en étau, entre le marteau et l'enclume, se voient en face d'un dilemme : soit fermer l'œil sur la détresse de ces Subsahariens flanqués de toute leur marmaille, élisant domicile au seuil de leurs immeubles H24, soit les dissuader de s'installer sous peine d'être taxés de xénophobes, voire de racistes. Il ne s'agit pas de ceux qui, au détour de chaque rue, exercent leur métier de fortune comme réparateurs de chaussures, pour aider leurs familles dans leur lointain pays, mais de ces souffreteux Subsahariens fuyant la misère dans leurs contrées pour venir occuper chaque jour un peu plus l'espace public, quémandant quelque obole pour subvenir à leur pitance. Des couples avec leurs enfants portant des vêtements dépenaillés balisent des quartiers sous l'œil indifférent des passants. Certains riverains les chassent, alors que d'autres font mine de ne pas voir leur mouise, celle-là même qui vient s'adjoindre à la débine de la communauté syrienne disséminée par grappes dans nos cités, le long de nos autoroutes et aux abords des mosquées. Autrefois, terre d'asile, offrant, l'on se rappelle, le gîte et le couvert aux Bosniaques fuyant le massacre de Srebrenica, perpétré par les Serbes au début des années 1990, Alger ne semble point s'émouvoir pour prendre en charge ces nouveaux exilés dans des centres d'accueil pour migrants illégaux, préférant les laissant errer et s'installer là où ça leur chante, se mêlant à la plèbe que nous sommes, loin des quartiers huppés. Cela nous rappelle cet exode des boat people vietnamiens, dont des sujets s'échouaient sans ressources sur les rues d'Alger avant d'être pris en charge, comme on s'en souvient, de ces Chiliens qui avaient fui la dictature d'Augusto Pinochet dans les seventies, avant d'atterrir pour quelque temps dans les rues d'Ibn Mezghenna.