L'artisan dans notre pays est marginalisé et n'a pas la place qu'il mérite», lance Mahdi Rahmoun, un artiste décorateur et sculpteur sur bois de la localité de Boumerdès. «Les pouvoirs publics n'ont pas fait grand-chose pour que l'artiste en général et le sculpteur en particulier avance dans son domaine d'activité», a-t-il ajouté. «Je nourris ma famille grâce aux rentrées des articles que je confectionne. Je fais la sculpture sur bois depuis vingt ans», a-t-il précisé ajoutant qu'il trouve du mal à écouler sa marchandise à cause d'absence d'espace de vente d'objets artisanaux dans la région. «J'ai sollicité les responsables locaux afin qu'ils m'attribuent un local où je pourrais exposer mes produits et développer mon activité, mais en vain», déplore-t-il. Notre interlocuteur souligne que la plupart des locaux réalisés dans le cadre du programme du Président sont à l'abandon alors que d'autres ont été octroyés à des personnes n'ayant aucun rapport avec le commerce. «Certains bénéficiaires sont des fonctionnaires», a-t-il déploré. Avant d'enchainer : «Pour le moment je travaille dans un local que j'ai loué, mais cela ne m'incite pas à me perfectionner dans mon domaine». Un autre artisan se plaint du manque de moyens matériels ainsi que les entraves bureaucratiques qui l'empêche de bénéficier des dispositifs d'aide au microcrédit. «Cela fait trois ans que j'ai formulé un dossier pour obtenir une aide auprès de la CNAC (caisse nationale d'assurance chômage), mais je n'ai pas reçu de suite favorable», regrette-t-il. Ce genre de problèmes et tant d'autres sont signalés par de nombreux autres artisans de la région, la wilaya en compte 600 environ. «Cela fait des années que je réclame un local, mais je n'ai eu que des promesses», lance un jeune sculpteur sur le cuivre et la céramique habitant à Boudouaou. Cet artisan affirme qu'il travaille chez-lui dans une chambre de quatre mètres carrés. «Le manque d'artisans dans le domaine m'oblige parfois à travailler jusqu'à une heure tardive de la nuit pour répondre à la demande des clients», a-t-il expliqué avant d'assurer qu'il est disposé à former des jeunes, notamment des stagiaires dans les centres de formation professionnelle. Mêmes les femmes artisanes sont pénalisées par le manque d'espaces de vente de leurs produits et d'endroits où elles peuvent développer leur activité. Une représentante de Res'Art (réseau de femmes artisanes algériennes) indique que cette carence a contraint des dizaines de ses camarades à changer d'activité. «Nous avons loué un petit local dans un centre commercial à Alger-centre, mais il est très exigu», dira-t-elle en se plaignant du manque de la matière première sur le marché. Une autre artisane souhaite l'organisation de salons de manière régulière à travers toutes les communes de la région pour pourvoir écouler leurs produits et permettre aux artisans de tisser des liens entre eux. «C'est grâce à l'association «Femmes algériennes pour le développement» que certaines d'entre nous ont réussi dans les métiers de l'artisanat», a-t-elle indiqué avant de regretter la disparation de cette association qui a été financée à l'époque par l'Unesco pour aider les femmes des milieux ruraux à développer leur talent et leur permettre de représenter la culture et les traditions algériennes à l'étranger.