L'enfant Gaya, né il y a 15 mois, recouvre enfin ses droits administratifs ! Une histoire ubuesque que seule l'administration algérienne est capable d'inscrire dans les annales. Le seul tort du papa, Ali Ouchen, et d'avoir opté pour le prénom Gaya pour son nouveau-né ! Ignorant ou feignant ignorer l'histoire de l'Algérie, l'APC de Arris, toute honte bue, refuse à ce citoyen le choix d'un prénom pour son fils, un nom que portait l'un des rois les plus illustres de l'histoire amazighe, et aurait peut-être préféré qu'il lui donnât un prénom iranien comme Sherazad, ou occidental comme Sabrina, Sofia, ou encore mieux latino-américain, comme Maria. Mais Gaya, prénom d'un des premiers rois amazighs, est considéré comme étranger. Il a fallu à Ali Ouchen 15 mois de course folle de bureau en bureau, de guichet en guichet et l'aide d'un avocat pour convaincre la justice algérienne de l'authenticité «algérienne» d'un tel prénom. Faisant fi de la Constitution algérienne et des conventions internationales ratifiées par l'Algérie garantissant les droits culturels de tous les Algériens, l'aberration ira même jusqu'à interroger le papa sur ses convictions religieuses ! En attendant, pourquoi cette même administration n'a-t-elle pas demandé au père de changer son patronyme ? «Ouchen» n'est-il pas autant étranger ? Le tribunal administratif de Batna a enfin rendu son verdict et l'enfant peut jouir de ses droits. A cet effet, la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) a déclaré se réjouir de «la décision rendue par le tribunal administratif de Batna le 10 novembre dernier dans l'affaire Gaya» et s'indigne «des arguments de la défense de l'administration lors de ce procès spéculant sur les convictions religieuses des parents pour justifier son refus». Le Réseau d'avocats pour la défense des droits de l'homme (RAADH), de son côté, dénonce «l'indifférence des pouvoirs publics face à de telles pratiques dont l'objectif caché n'est plus à démontrer». Maître Kouceila Zerguine, avocat de Gaya, se dit soulagé par le dénouement de ce premier cauchemar et déplore l'attitude du gouvernement algérien pour mettre un terme à la discrimination exercée par les institutions publiques, en rappelant la décision de l'ex-ministre de l'Intérieur relative à la promulgation de la liste portant les 300 prénoms amazighs. Le même Kouceila Zerguine informe de la récidive de l'administration, puisqu'il est appelé à prendre la défense d'un autre nouveau-né : Thifour (belle lune en tamazight). Une fillette née le 9 novembre à T'kout, où l'officier d'état civil exige des parents l'autorisation du procureur de la République !