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Utiliser la diaspora pour accélérer le développement
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Publié dans El Watan le 24 - 11 - 2014

La mondialisation devient un vaste champ de compétition où tout un chacun essaye de faire prévaloir ses atouts distinctifs. Nous n'allons pas évoquer le fameux débat des conséquences de la mondialisation : est-il un jeu gagnant/gagnant, ou gagnant/perdant ? Cela prendrait trop de temps. Mais force est de constater que les pays mobilisent d'énormes moyens et des outils de plus en plus sophistiqués pour tirer profit de l'ouverture à l'économie mondiale.
L'intelligence économique, les bases de données, les stratégies de pays et d'entreprises, l'amélioration perpétuelle des qualifications humaines et des pratiques managériales ne sont qu'un échantillon d'atouts qu'utilisent les pays pour hisser le niveau de leur compétitivité et s'imposer au sein de l'arène mondiale. Parmi les atouts que n'oublient pas de mobiliser les pays figure en pole position le potentiel financier et surtout intellectuel de leur diaspora. Dans notre pays, on ne peut que constater la saignée de nos élites intellectuelles. Entre 2004 et 2006, plus de 70 000 diplômés ont quitté le pays (source CNES). Le rythme a baissé mais l'hémorragie continue.
Il en tirerait d'énormes dividendes. 75% des investissements étrangers en Chine proviennent de sa diaspora. Cette dernière contrôle plus de 50% des actifs en Indonésie et en Malaisie. Plus de trois millions de personnes vivant aux USA contribuent de plusieurs manières au développement de la Chine. Le pays vise à devenir numéro un en matière de qualité de l'enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l'innovation technologique. Il est déjà numéro un en matière de qualité du système éducatif.
Une diaspora compétente : Un précieux atout pour tout pays qui veut bien l'utiliser
Dans le volet scientifique, il s'appuie également sur une très forte diaspora qui a fréquenté les meilleures universités et centres de recherche mondiaux. En plus de sa diaspora historique, le pays donne des bourses à des centaines de milliers d'étudiants pour transférer le savoir-faire des meilleures universités et centres de recherche mondiaux. Ceci renforce le jumelage et les implantations massives d'universités étrangères en Chine (Harvard, MIT, etc.). L'Inde fait la même chose. La diaspora fait le bonheur de ces deux pays.
Nous avons bien quelques hirondelles qui ne font pas le printemps. Tout n'est pas noir. Nous avons quand même quelques investissements qui proviennent de la diaspora.
Certes, ce ne sont pas des investissements massifs d'apports technologiques conséquents. On peut citer la création de la chaîne hôtelière IBIS Algérie par des enfants de ce pays. D'autres projets ont vu le jour. Quelques universités publiques font régulièrement appel à des conférences ou séminaires avec une forte contribution de la diaspora algérienne. Les instituts hors MES et des business schools privées font carrément appel à des enseignants algériens expatriés pour dispenser quelques cours.
La mise en place du programme «Casbah Business Angels» pour fouetter la création d'entreprises est un exemple de programme qui peut changer beaucoup de choses dans notre pays. Mais, de l'avis de tous, le degré d'utilisation du potentiel intellectuel de notre diaspora demeure nettement insuffisant. Les pouvoirs publics ne disent pas le contraire. Ils ont effectué plusieurs tentatives sans pour cela aboutir à des résultats satisfaisants. Les bonnes volontés existent. Mais les méthodes et les outils utilisés restent inappropriés.
De nombreuses voix s'élèvent en disant qu'avant de chercher à recruter parmi notre diaspora, il faudrait d'abord mettre en place des politiques pour retenir les compétences dont nous disposons. Bien sûr qu'il faut le faire. Mais s'en tenir uniquement à cela priverait le pays d'atouts extraordinaires. D'ailleurs, si on améliore la situation pour les compétences nationales, on aurait déjà commencé à attirer nos compétences expatriées. Que se passe-t-il en l'absence d'une politique d'utilisation judicieuse du potentiel de la diaspora ? En premier lieu, les pays récepteurs les utiliseraient pour dominer nos marchés.
Vers un revirement de stratégie
Les améliorations technologiques, agricoles et touristiques dans ces pays vont provoquer une hausse des importations et une grande dépendance alimentaire, technologique, intellectuelle et autres. D'autres pays peuvent les utiliser. Le Qatar crée un fonds d'investissement pour les jeunes entrepreneurs des banlieues en France en se basant sur le savoir-faire de notre diaspora. Il va en récolter de précieux dividendes.
Le débat sur la manière de faire participer la diaspora au développement national vire toujours aux éléments matériels. Ce qui est tout à fait raisonnable. Nous ne pouvons leur demander de réduire leurs niveaux de vie et consentir de grands sacrifices, même si certains l'accepteraient. Les Chinois donnent des salaires à leur diaspora 20 à 50% supérieurs à ceux qu'ils empochaient dans les pays d'accueil. L'amélioration de leur niveau de vie est indispensable, incontournable mais pas suffisant. Le second point serait pertinent à l'environnement de travail. Ces personnes sont habituées à un milieu beaucoup plus attrayant : crèches pour enfants, parcs de loisirs, théâtres, bowling etc. Certes, certains peuvent consentir des sacrifices. Mais ce ne sont pas toujours les parents qui choisissent. On sait en marketing que les enfants sont décideurs pour beaucoup d'options importantes (véhicule, logement, etc.).
La diaspora peut être utilisée de deux manières. En premier lieu, laisser nos élites dans leur pays d'accueil tant qu'on n'a pas les conditions de leur réinsertion, tout en les utilisant à temps partiel. Ils peuvent alors former nos cadres, introduire les méthodes et les outils pour innover, améliorer l'éducation, booster la compétitivité de nos entreprises, dynamiser nos centres de recherche, etc. Ceci serait possible en travaillant avec eux pour mettre en place un programme efficace avec les ressources matérielles et financières appropriées. Ceci serait un bon début.
Lorsque les conditions sociales et matérielles s'y prêtent, on peut leur faire appel à la manière chinoise pour rentrer définitivement. Il faut régler les conditions matérielles et environnementales. Mais il reste un point de taille. Il demeure qu'ils ont besoin d'une vision, d'une stratégie, d'un challenge, d'un défi grandiose : par exemple, Algérie pays émergent en 2025 et développé en 2050. On ne peut pas leur dire venez et on a une vision de loi de finances chaque année. Ceci n'est pas mobilisateur. Il faut qu'ils sentent qu'ils participent à la réalisation d'un rêve grandiose pour leur pays. Alors, en attendant d'avoir un projet de société motivateur, on peut toujours rêver de les rapatrier.


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