La prise d'assaut, assuraient encore hier les services de sécurité russes, ne figurait pas dans leurs plans. Mais toujours est-il l'assaut a bel et bien eu lieu hier pour mettre fin à ce qui est de toute évidence, la plus grosse prise d'otages, puisque ce sont plus de mille personnes qui étaient retenues depuis mercredi dans une école d'Ossétie du Nord, une des nombreuses républiques de la Fédération de Russie. Le bilan est lourd, comme dans la plupart des opérations de ce genre quand chaque partie fait preuve d'intransigeance. En effet, plus de cent otages sont morts dans le gymnase de l'école de Beslan, rapportait l'agence Interfax, citant son correspondant sur place. Certains ont été tués par l'effondrement du toit du bâtiment, provoqué semble-t-il par l'explosion de charges installées par le commando pro-tchétchène qui retenait des centaines de personnes dans l'école. L'on parle aussi de plus de quatre cents blessés dans cette prise d'otages, une de trop mais qui risque de ne pas être la dernière dans cet espace, le Caucase, traversé par de profondes contradictions, rivalités et sentiments nationalistes. Le dénouement devenait imminent lorsque le commando, qui avait pris en otage l'école de Beslan en Ossétie du Nord, a pris la fuite hier après-midi. L'attente aura duré trois jours. Hier, après de vaines négociations, le commando a fait exploser des charges installées dans l'école, provoquant l'effondrement partiel du toit. Une trentaine d'otages a alors cherché à s'échapper et le commando a ouvert le feu pour tenter de les en empêcher. Les forces de sécurité russes ont riposté, pendant que d'autres otages quittaient le bâtiment. Il n'y aurait donc pas eu d'assaut préparé à l'avance par les forces spéciales russes, les « Spetznaz ». « Il ne s'agit pas d'un assaut, mais des suites de la fuite d'un important groupe d'otages », a déclaré une source à la cellule de crise, sur la radio Echo de Moscou. Des membres du commando ont ensuite tenté une sortie, en tirant sur la foule, puis certains se sont réfugiés dans une maison, proche de l'école. Le ministère de l'Intérieur de l'Ossétie du Nord a annoncé que deux femmes du commando avaient pu s'échapper et que d'autres membres du commando tenteraient de s'échapper par le sud de la ville. Treize membres du commando seraient recherchés, affirmait hier la police locale, ajoutant que cinq des preneurs d'otages auraient été tués lors des affrontements. Le président ossète Alexandre Dzassokhov a reconnu que le nombre des otages s'élèverait à plus de 500. Jusqu'à présent, les chiffres officiels faisaient état de 300, mais plusieurs témoignages de femmes libérées mercredi dernier par le commando et citées par la presse russe parlaient de plus de 1000 personnes. M. Dzassokhov a par ailleurs confirmé la principale exigence des preneurs d'otages : « L'indépendance de la Tchétchénie » et que celle-ci devienne « un Etat hors de la Russie ». Moscou a finalement résolu cette crise sans faire de vagues. Pour rappel, sa réaction lors de la prise d'otages dans le théâtre de Moscou avait été vivement critiquée. Poutine y avait mis brutalement fin, et plus de 150 otages avaient trouvé la mort. Cette fois-ci, l'Union européenne a « regretté » que la prise d'otages de l'école de Beslan n'ait pu trouver une issue pacifique, mais a précisé « comprendre le dilemme » des autorités russes face à la situation, a rapporté Reuters. L'UE a ajouté qu'elle condamnait « pleinement et sans conditions toutes les formes de terrorisme ». Poutine a désormais les mains libres pour continuer sa guerre en Tchétchénie. L'action violente et désespérée des indépendantistes tchétchènes vient de lui donner des arguments imparables pour justifier son combat contre ceux qui refusent de se fondre dans la « Grande Russie ».