Le président du Conseil national consultatif pour la promotion de la PME, Zaïm Bensaci, considère, dans cet entretien, que la sous-traitance, telle que vue par les initiateurs du projet Renault Algérie, ne répond pas à l'ambition souhaitée des pouvoirs publics de voir l'industrie mécanique algérienne renaître de ses cendres. Un taux de 40%, tel qu'annoncé, est, selon lui, irréalisable. -Les pouvoirs publics comptent beaucoup sur le projet Renault Algérie pour relancer l'industrie mécanique et par la même développer la PME algérienne à travers le développement de la sous-traitance. Quelle est cette stratégie ? D'emblée, je dois dire que sur le plan mécanique, il ne peut y avoir de sous-traitance avec Renault. La raison est que tous les constructeurs automobiles ont leurs propres équipementiers chargés de leur fabriquer des sous-ensembles (boîte de vitesses, train avant, organes de direction etc.) et ce sont eux qui font appel aux sous-traitants. C'est ce qui s'est passé au Maroc, par exemple, où le réseau de sous-traitants a été constitué autour des équipementiers ramenés par Renault. Dans le cas de Renault Algérie, cela m'étonne beaucoup qu'un quelconque organe mécanique soit confié à des sous-traitants. On peut, peut-être, leur confier la fabrication de joints en caoutchouc, de sièges, de tapis et autres, mais pas de pièces mécaniques. -Qu'est-ce qui fait que vous soyez aussi catégorique ? Je dis cela parce que, dans le cadre des discussions entamées avec le constructeur, on aurait dû faire appel aux gens de la profession pour voir de quelle manière ils peuvent s'insérer dans ce processus, ou du moins, être informés et se préparer par la suite. Or, les discussions ont eu lieu uniquement entre les différents ministères concernés et Renault. Aujourd'hui, on nous parle de l'objectif de réalisation d'un taux d'intégration de 40%. C'est faux, il n'y aura jamais une intégration de ce niveau. -Actuellement il est de 17%... A quoi correspond ce taux réellement ? Est-ce un objectif ou bien le taux réel ? Et puis, même si c'est du réel, je ne vois pas quelle est la part de l'industrie mécanique dans une intégration qui se limite à la fabrication de joints en caoutchouc. Disons, tout de même, que c'est un début, mais ce n'est pas du tout à quoi on s'attendait. -Pourquoi pensez-vous qu'une intégration de 40% est irréalisable ? Avant de construire son usine, Renault savait très bien qu'on n'avait pas d'unités de sous-traitance performantes. De plus, sans équipementiers, il ne peut y avoir de réseaux de sous-traitants. Certes, nous n'avons pas toutes les compétences nécessaires, mais en travaillant avec les équipementiers, les choses peuvent se développer. Il ne faut pas oublier qu'on a un réseau de sous-traitants, qui travaillent avec la SNVI autour de laquelle un réseau de 300 PME a été constitué. Il aurait fallu faire un véritable audit pour savoir dans quelle mesure ces unités auraient pu être développées pour contribuer non seulement au projet Renault, mais aussi à ceux lancés par d'autres grands donneurs d'ordres comme Sonatrach, Sonelgaz ou autres. -Globalement, quel avenir pour la sous-traitance industrielle en Algérie ? Il est vrai que nous n'avons pas suffisamment d'unités sous-traitantes performantes mais le peu que nous avons doit être d'abord recensé, puis aidé notamment pour l'acquisition de nouveaux équipements. Si un sous-traitant doit renouveler ses machines, celles-ci doivent d'abord répondre à un besoin bien précis exprimé par les donneurs d'ordres. Il faut aussi que le discours des pouvoirs publics soit clair. Il y a eu, à un certain moment, une convention entre le ministère de l'Industrie et le ministère de l'Energie et des Mines pour développer la sous-traitance dans ce domaine, mais cela n'a concerné que les entreprises publiques. Je ne vois pas pourquoi l'entreprise privée n'a pas été associée à cette démarche.