Comptant 150 articles, le projet de loi portant protection de l'enfance actuellement sur le bureau de l'Assemblée nationale comporte des avancées considérables, mais en même temps des ambiguïtés qui appellent à une grande mobilisation pour sa réforme avant qu'il ne soit adopté. C'est ce qui ressort de l'intervention de Nadia Aït Zai, directrice du Ciddef : «Nous sommes sortis de la jouissance des droits à l'exercice de ces derniers.» Pour Mme Aït Zai, le législateur a voulu harmoniser les textes existants avec la Convention internationale qui consacre les droits de l'enfant. Il prévoit un défenseur national des droits de l'enfant, qui est l'intermédiaire qui se chargera de la protection de l'enfance. Le texte préconise aussi «la médiation, qui permet de négocier avec le juge la sanction du mineur, et limite à 13 ans l'âge en deçà duquel l'enfant ne peut être mis en prison ; il préconise l'enregistrement vidéo du témoignage de l'enfant victime de violence», souligne Mme Aït Zai, afin de lui éviter de revivre sa douleur en multipliant les auditions. La conférencière note cependant que le projet de texte comporte des anomalies qu'il faudra corriger ; elle cite la multiplicité de la définition de l'âge du mineur, en appelant à ce que le législateur retienne celui contenu dans la Convention internationale des droits de l'enfant. Elle évoque également la protection juridique, qui nécessite une meilleure approche que celle adoptée par le projet de loi. Une élue de l'APC d'El Biar déclare être choquée à chaque fois qu'elle voit des enfants se livrer à la mendicité alors que la loi l'interdit. Représentant la Sûreté nationale, maître Kheira Messaoudène qualifie la mise en place d'un médiateur d'«avancée» dans le sens où, explique-t-elle, il soulagera la DGSN de sa mission actuelle de prise en charge des enfants en danger moral pour ne s'occuper que de la délinquance juvénile. A ce titre, elle évoque les statistiques des neuf premiers mois de l'année en cours, relatives à la criminalité juvénile qui va du simple vol jusqu'à l'homicide volontaire. Ainsi, la police a arrêté 4071 mineurs, 1600 pour vol, 1204 pour coups et blessures volontaires, 225 pour dégradation de biens d'autrui, 7 pour homicide volontaire, 9 pour tentative d'homicide et 37 pour violence sur ascendant. La catégorie d'âge la plus touchée est celle comprise entre 16 et 18 ans avec 2915 mineurs, suivie des 13-16 ans avec 1380 cas et des moins de 10 ans avec 80 cas. Pour ce qui est des enfants en danger moral, Mme Messaoudène déclare en outre que 5220 ont été victimes de violence durant la même période. Un chiffre, précise-t-elle, également en nette progression par rapport aux statistiques des années précédentes. Parmi eux, 3163 ont subi des violences physiques et 1420 ont été victimes d'abus sexuels, dont 620 garçons et 598 filles. En outre, 443 mineurs ont été maltraités, 173 ont fait l'objet d'enlèvement avant d'être retrouvés, 7 ont subi des coups et blessures volontaires et 10 ont malheureusement été tués. Pour l'oratrice, les raisons de cette violence sont à chercher dans la démission parentale (notamment le père), la crise morale, les conséquences du terrorisme des années 1990, etc.