La question est inévitable : que va faire le Forum de Crans Montana dans la ville sahraouie de Dakhla en décidant d'y tenir sa session annuelle de 2015 ? Ou encore que recherche-t-il ? Et en ce sens, cette organisation internationale qui se consacre à la construction d'un monde plus humain, qui a d'ailleurs dédié sa première réunion à la reconstruction d'une Europe post-guerre froide, ne devrait pas ignorer que cette localité, tout comme du reste l'ensemble du Sahara occidental, est sous occupation marocaine depuis 1975. Les textes de l'ONU sont pourtant clairs et sans la moindre ambiguïté en portant le Sahara occidental sur la liste des pays et territoires occupés. Et c'est sous l'angle de la décolonisation que cette question est traitée, à vrai dire, depuis bien longtemps, ce qui n'aurait alors pas dû échapper aux organisateurs de la réunion. Droit à l'autodétermination et principe du référendum reviennent très régulièrement dans les résolutions du Conseil de sécurité, ce qui aurait dû attirer l'attention des organisateurs envers lesquels la direction sahraouie se montre sans la moindre complaisance. Pas question pour elle de plaider l'ignorance, mais cela est-il possible à un tel niveau de responsabilité et de notoriété ? Non, à suivre les dirigeants sahraouis qui ont condamné ce choix en considérant que «cette décision est une violation flagrante du droit international et une agression contre le peuple sahraoui dans son entier et une contradiction, non seulement aux exigences de la légitimité internationale, mais aussi aux principes et objectifs déclarés du Forum de Crans Montana». Que recherche donc cette organisation qui n'a pas hésité à violer ses principes ? Il va de soi que l'occupant marocain va s'en servir comme d'un alibi pour conforter ses thèses. Ou encore, comme le soulignent les dirigeants sahraouis, «légitimer son occupation militaire illégale à travers l'implication des pays, des entreprises et des organisations internationales dans le pillage et l'exploitation illégale des richesses du peuple sahraoui». Mais qui y croit réellement, puisque même les plus proches alliés de ce pays refusent d'aller au-delà d'un seuil qui les impliquerait davantage, c'est-à-dire entériner un fait colonial alors même qu'ils avaient voté en faveur du plan de paix de l'ONU reconnaissant le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination ? Il est vrai que des valeurs ont été bafouées pour de l'argent et que, pour cela, certains se sont même laissés aller à des considérations qui n'ont absolument rien de rationnel. Les discours n'ont pas pesé bien lourd quand il s'agit d'affaires. Il y a une vérité incontestable à laquelle même le Maroc avait adhéré en signant l'accord de paix avec le Front Polisario en 1988, devenu celui de l'ONU, avant de se rétracter en 1991. Il croit pour cela trouver là la dernière carte, mais celle-ci est bien dérisoire, avec un rejet systématique. Le Maroc le sait parfaitement.