Le boxeur algérien Djamel Dahou a bouclé l'année 2014 en apothéose après s'être adjugé le titre mondial WBC Youth World Championship à Bordj Bou Arréridj, le 19 décembre, devant le Mexicain Daniel Valenzuela. C'est le troisième titre mondial que le natif de Tiaret décroche, alors qu'il n'est âgé que de 22 ans. Il est détenteur à ce jour de deux titres mondiaux WBC Youth et du titre mondial UBO. L'Universal Boxing Organization (UBO) l'a sacré meilleur boxeur de l'année 2014. Avec son 1,82 m et son air d'étudiant, il pourrait passer inaperçu tant il n'a pas du tout le profil de pugiliste. Sa conversion dans le monde de la boxe a été presque un choix forcé. Voulant suivre les traces de son père, ancien joueur de foot dans l'équipe de la Sempac de Tiaret, tout gamin, Djamel Dahou a dû mettre un trait sur sa carrière de footballeur à la JSMT au bout de deux matches seulement. «Lors d'un match joué à Sougueur, un de mes coéquipiers m'a frappé juste parce que j'ai marqué au lieu de lui remettre le ballon. Je n'ai plus remis les pieds au club... Dans mon quartier, je me faisais souvent agresser sans jamais pouvoir me défendre. Mon père venait chaque fois à mon secours, mais il me reprochait de ne pas me défendre seul», explique-t-il. Carrière L'art de «rendre les coups», il va l'apprendre avec son oncle qui était entraîneur de boxe dans un... haouch. «Au début il voulait juste se défendre, mais il a énormément progressé. J'ai décelé en lui du potentiel, il pouvait devenir boxeur. Avec du sérieux et du travail, il a été trois fois champion du monde», précise son entraîneur et oncle, Khaled Benacer. Le petit Djamel s'est entraîné durant deux ans et a même décroché le titre de champion de wilaya à 12 ans sans que son père le soupçonne. «Je ne l'ai su que le jour où son oncle et lui m'ont demandé de lui établir une autorisation paternelle pour qu'il puisse boxer au niveau régional.» Ce choix a tout de même fait grincer des dents dans la famille. La maman pleure à chaque fois, même en regardant un ancien combat que son fils a déjà gagné. Son père s'est fait une raison : «Comme tout les Algériens, j'aime la boxe. C'est avec un grand plaisir qu'on suivait les légendaires boxeurs comme Mohamed Ali, Joe Frazier et George Foreman à la télé, mais je n'ai jamais pensé que mon fils deviendrait boxeur. J'aurais voulu qu'il continue ses études, car il était assidu. Mais cela ne m'a pas empêché de l'encourager. Pour le prouver, je suis moi-même devenu promoteur manager...» Mokhtar Dahou a même été désigné meilleur manager 2013 et 2014. Reconnaissance Djamel le boxeur gravit très vite les échelons et remporte, à 16 ans, la Coupe d'Algérie amateur. Il n'a jamais caché son admiration pour la boxe professionnelle qui, selon lui, a «plus de prestige». En 2010, à 18 ans, il passe professionnel. Il livre son premier combat dans la catégorie léger à Tessala El Merdja face à aux boxeur Fateh Mouna, qui le bat aux points. «Ce combat a été très difficile face à un boxeur qui avait le double de mon âge et était champion d'Afrique. A la fin du combat, mon père m'a dit : ‘Tu n'as rien d'un boxeur. Il vaut mieux que tu arrêtes'», se rappelle, en riant, Djamel Dahou. Le 12 avril 2012, il bat, en demi-finale du Championnat d'Afrique UBO, le Marocain Hicham Rkaybi par KO dès le premier round. Ce succès lui ouvre la voie du titre africain. Il devient champion d'Afrique UBO des super-légers, le 20 avril 2013, en s'imposant, par KO au second round à Dar Es Salam, devant le Tanzanien Hamis Ajali. Le World Boxing Council (WBC) lui donne son feu vert pour boxer sous sa coupe. Pour disputer le titre mondial espoirs du poids welter, il doit défier le Ghanéen Frank Dodze chez lui, à Accra. Le natif de Tiaret s'impose par KO au troisième round et devient champion du monde WBC espoirs le 23 septembre 2013. Il est reste par la suite neuf mois sans combattre en raison d'une tendinite. Mépris Cette blessure n'empêche pas le boxeur de poursuivre sa marche victorieuse. Djamel Dahou s'adjuge le titre mondial UBO des poids welters et devient le plu jeune tenant d'un titre de cette fédération, en s'imposant à Moshi, sur le Tanzanien Saïd Yazidu, le 12 septembre 2014. Le 19 décembre dernier, Djamel Dahou conserve son titre WBC espoirs par intérim des poids welters en battant par KO le Mexicain Daniel Valenzuela. L'Algérien compte à ce jour 13 victoires en professionnel, dont 12 par KO. Djamel Dahou veut encore progresser et hisser le drapeau algérien plus haut. Mais en plus de ses adversaires, le boxeur doit faire fasse à une multitude d'obstacles. Il s'entraîne dans une salle indigne d'un champion du monde, léguée par la Forem à Tiaret. «C'est grâce à mon sponsor que j'ai pu m'acheter des gants ainsi qu'un casque professionnel lors j'étais en Angleterre.» Même si le promoteur Benhamadi s'est chargé de l'organisation du combat de Bordj Bou Arréridj, le père du boxeur souhaite qu'un sponsor parraine le boxeur, même à l'année. «Mon père a dû vendre la maison, sa voiture pour pouvoir subvenir à mes dépenses», confie Djamel Dahou. L'athlète est également en quête de reconnaissance. Malgré ses trois titres mondiaux, il n'a même pas eu droit à une petite réception de la part des autorités locales. Dahou a attendu vainement les félicitations des autorités locales et sportives nationales. D'ici le prochain défi, Djamel continue à faire des footings, dès 4h, à Tiaret et à s'entraîner parfois jusqu'à quatre fois par jour, en espérant une reconnaissance de son pays.