Des députés sont sortis de leur tranchée pour défendre la politique de subventions lors du récent débat sur la loi de règlement budgétaire. C'est un refus de principe et sans nuance des parlementaires, rejetant la moindre discussion sur le sujet en avançant comme argument que l'on ne doit pas toucher aux acquis sociaux des Algériens. Rien ne justifie, aux yeux de la majorité des élus, que l'on puisse évoquer la question. Pas même la situation financière du pays, née de ce nouveau choc pétrolier qui a vu le prix du baril de pétrole chuter de 55 dollars entre juin et décembre 2014. Ils rejoignent en cela l'attitude du gouvernement de M. Sellal pour qui il n'y a pas lieu de revoir la politique financière et budgétaire afin de l'adapter à la conjoncture actuelle, hormis quelques mesures conjoncturelles comme le gel des recrutements dans la Fonction publique ou le report de certains projets d'investissement non prioritaires qui n'ont pas encore démarrés. La sous-estimation de la gravité de la situation de la part de l'Exécutif et des «élus de la nation» tranche pourtant avec les appels des économistes, des experts et des institutions monétaires et financières internationales à une plus grande rigueur dans la gouvernance reposant sur des mesures hardies pour diversifier l'économie, relancer l'industrie et améliorer le climat des affaires, entre autres. Ne rien faire et maintenir le statut quo, c'est-à-dire une distribution spécifique de la rente où la corruption conserverait sa place, semble le credo des uns et autres. Ce déni de la gravité d'une situation va jusqu'à rejeter la nécessité d'aller vers une meilleure allocation des subventions, reposant sur la solution de facilité qui consiste à recourir à la cagnotte constituée par le Fonds de régulation des recettes, le fameux FRR, depuis une dizaine d'années. Pourtant, ce sujet tabou des subventions a déjà été abordé dans les années 1990, lorsque la situation financière du pays était critique et que l'endettement extérieur avait atteint son pic le plus élevé.L'UGTA, par la voix de son défunt secrétaire général Abdelhak Benhamouda, marquait à l'époque son refus de voir que le soutien des prix des produits de première nécessité puisse profiter aussi bien aux salariés qu'aux fabricants de biscuits ou de chocolat à travers un prix unique du kilo de sucre.Le syndicaliste plaidait, à l'époque, pour un ciblage des subventions au profit de ceux qui en ont le plus besoin : les salariés, les revenus fixes et autres retraités. Une attitude défendue des décennies plus tard l'ancien ministre des Finances, Karim Djoudi, qui préconisait en 2014, devant les ministres arabes, «la rationalisation de l'action à travers des formules de subvention plus performantes afin de cibler les catégories nécessiteuses et de remédier à certains dysfonctionnements structurels». Poursuivre cette politique sans discernement, notamment pour les produits énergétiques (essence et autres carburants), aggraverait encore davantage les déficits et nourrirait encore plus la contrebande de ces produits vers les pays voisins où les prix sont libres. Doit-on continuer à ignorer tous ces aspects qui relèvent de la stabilité et de la souveraineté du pays ?