A la crevette ou à la viande hachée, mélangé à de la purée, du thon et du fromage, avec du persil, des olives, des oignons, un œuf, du beurre et un petit chouïa de harissa s'il vous plaît, le tout enveloppé et plié dans des feuilles de dioul et jeté dans de l'huile bouillante et voilà une autre spécialité d'El Kala que s'arrachent les vacanciers à la tombée de la nuit. Il faut commander ou attendre jusqu'à une heure pour avoir son bourek chaud, sinon on prend ceux qui sont déjà prêts mais un peu tièdes. Les prix ont grimpé au fil des ans. Ils sont alignés à chaque saison par tacite entendement. Cet été, c'est 65 DA le spécial avec viande ou crevette et 45 DA le normal. La concurrence joue dans la propreté du préparateur, son local, son attirail et aussi son ancienneté. C'est donc la dextérité devant la foule qui bave impatiente au coup de feu et la blouse blanche rarement immaculée qui vont faire la différence. Il y en a qui ont pignon sur rue et on se bouscule devant leur étal et d'autres, en face, qui attendent patiemment leurs habitués. Et attention, c'est important, le bourek d'El Kala, doré, dodu, carré, rectangulaire ou triangulaire n'est pas le brik tunisien, dioul plié en demi-lune et frit avec un œuf dedans. La frontière est encore loin : 15 km. Avec le bourek d'El Kala, on dîne à satiété si on n'est pas gros mangeur. Et c'est tellement vrai qu'avec la profusion des vendeurs, on a pris une nouvelle habitude dans la ville du corail : celle de dîner dehors en famille sur le bord de mer avec des boureks chauds. C'est bien entendu un luxe qu'on ne peut pas s'offrir tous les jours, mais cela arrange beaucoup les vacanciers qui se laissent aller le temps d'un bel été et trouvent ainsi un substitut à l'absence de restaurants dignes de ce nom. Un conseil tout de même, avant de savourer votre bourek, vérifier la couleur de l'huile dans la bassine, il ne faut pas qu'elle ressemble à du goudron. Elle doit montrer quelques signes de transparence et surtout soyez sans pitié sur la propreté. Il y en a qui l'ont regretté. A mort.