Chassés la veille, les manifestants d'In Salah, très nombreux, ont repris possession de leur place emblématique Somoud. Ils étaient quelque 4000 manifestants à accéder, hier, place Somoud, après en avoir été éjectés la veille vers minuit par les tirs de bombes lacrymogènes. La population d'In Salah vient de reprendre possession de l'emblématique esplanade de la résistance antigaz de schiste. Après un samedi violent et une nuit mouvementée, les forces de l'ordre ont réussi à lever le camp dressé depuis deux mois sur la place Somoud, jouxtant le siège de la daïra d'In Salah. D'impressionnantes images de tentes brûlées ont circulé durant la nuit sur les réseaux sociaux, dénonçant la violence excessive contre les manifestants, hommes et femmes, qui sont sortis dans la rue en fin d'après-midi pour demander aux gendarmes et aux policiers de relâcher les détenus arrêtés dans la matinée, qui ont fini par être libérés vers 16h. Mais les affrontements entre les agents antiémeute et les manifestants ne se sont pas estompés pour autant. La confrontation a continué de plus belle, dans la nuit, avec pour seul objectif une épreuve de force visant à déloger les habitants de la place Somoud et effacer tous les signes d'une résistance inédite qui aura duré exactement 60 jours. Hier matin, ils étaient des centaines à se regrouper devant le siège de la daïra. D'abord depuis les quartiers voisins pour contourner les 4000 manifestants sur place, puis d'autres quartiers, quadrillés par la police et repoussés par le cordon sécuritaire massif, se sont joints à ce défilé bizarre où les CRS couraient derrière eux avec des bombes lacrymogènes. Violents affrontements Les manifestants entonnaient un chant patriotique, Samidoun lil ghaz sakhri rafidoun (nous résistons et refusons le gaz de schiste). Ils manifestaient contre les violences policières, une résistance affichée après les événements de la veille. Des témoins parlent «de bombes lacrymogènes encore plus fortes, qui n'ont pas épargné les établissements scolaires, notamment Omar Ibn El Khettab où des jets ont atteint les classes où les enfants essayaient de passer leur premier examen de la journée». A l'heure où nous mettons sous presse, les affrontements se poursuivent. Des images ahurissantes de femmes déplaçant des fardeaux de bouteilles de vinaigre ou brisant des roches pour alimenter Sahat Somoud en cailloux. Le matin, des avions militaires ont acheminé les renforts attendus depuis deux ou trois jours, selon nos sources. Ces renforts ont vite pris position dans les points névralgiques d'In Salah qui vit ses premières émeutes et où la première confrontation avec les forces antiémeute suscite beaucoup d'amertume et un regain de mobilisation. L'étincelle ? Des affirmations officielles qui circulent depuis jeudi dernier sur le maintien de la fracturation hydraulique décriée par la population et… de la bouche même du chef de brigade chargé de la protection de la base de vie de Halliburton, située à 10 km d'In Salah, qui aurait crié aux manifestants samedi matin : «Nous sommes là pour protéger ceux qui viendront fracturer le second puits, vous n'y pourrez rien.» Une nouvelle provocation, de nouveaux blessés qui sont soignés à domicile pour éviter d'être repérés par les forces de l'ordre.