Un monde fou. Incroyable le nombre de vacanciers en direction de la Tunisie, rapportent des cambistes se trouvant le long du boulevard d'Om Teboul qui proposent le dinar tunisien à 60 DA. On y trouve des immatriculations représentant toutes les régions du pays avec une nette prépondérance pour les régions du centre du pays, comme Alger, Tipaza, Boumerdès et Blida. Aux postes frontaliers de Haddada (Om Teboul, El Kala) et Feidj Kahla (El Aïoun, El Kala), on parle de plus de 400 véhicules et jusqu'à 3000 passagers par jour. Et pourtant, en nous y rendant, nous n'avons pas trouvé la foule et les bousculades qui accompagnent généralement les vacanciers. Le calme règne dans la salle du poste d'El Aïoun alors qu'il est presque 10 h. Il ne fait pas trop chaud, il n'y a pas de monde devant les guichets de la PAF et des douanes, et assez de sièges pour les quelques familles qui attendent. « Le plus dur de la journée est déjà passé. Les procédures sont plus rapides et nous faisons de gros efforts pour satisfaire les passagers et surtout pour éviter la foule qui énerve tout le monde. Nous attendons ceux du soir, on verra », nous explique un policier des frontières. Le chef du poste dans son bureau, assailli par le téléphone, garde toutefois tout son calme pour expliquer à des nationaux résidants à l'étranger pas très convaincus, pourquoi leurs documents sont en irrégularité. « C'est ainsi 24 heures sur 24 et cela depuis des semaines », s'explique-t-il après leur départ. Côté douanes, l'informatique a manifestement apporté un plus pour les formalités et la fouille, même sans les scanners. De l'autre coté de la barrière qui marque la ligne frontalière, vu le nombre de voitures dans les parkings du poste tunisien, le rythme est visiblement plus lent. Nous interrogeons un passager qui en sort. « Il y a beaucoup de monde qui patiente dans le hall, cela n'avance pas pour les gens qui entrent en Tunisie. Pour nous, c'est différent, car les formalités sont plus rapides dans l'autre sens, et puis il y a ceux qui passent plus facilement que les autres comme partout ailleurs parce que ce sont des habitués et connus des agents ». Mais pourquoi cet engouement croissant pour la Tunisie ? Les réponses se ressemblent toutes que ce soit des familles nombreuses, des couples sans enfants ou des célibataires. « On est là pour les vacances et non pas pour le shopping, précisent certains, et surtout pour passer des vacances en sécurité et dans la tranquillité et la propreté. La qualité des services et des prix sont accessibles à toutes les bourses. » Destinations privilégiées des Algériens : Hammamet, Nabeul, Sousse. Pour les femmes, c'est nager librement sans le regard inquisiteur, voyeur, indiscret, indécent et malsain, « ce regard qui s'impose maintenant en maître incontesté et inquisiteur sur les plages d'Algérie ravagée par les charlatans et leur religiosité », explique une maman accompagnée de ses filles qu'elle ne veut pas priver des plaisirs de la mer qu'elle a connue plus jeune dans une Algérie plus tolérante. « Au début, on avait réservé pour un mois à Benihoua (Tipaza), mais avec ce qui s'est passé au début de l'été, on s'est dit autant se payer une bonne quinzaine de jours tranquilles », nous dit le père d'une famille en route pour Nabeul. En fait, ces résidents de Blida ne sont pas les seuls à fuir l'insécurité, réapparue sur le littoral du Centre, tout le monde le reconnaisse à demi-mot. Et pourtant question plage et nature, l'Algérie n'est pas en reste. « Rien qu'à El Kala, il y a de quoi satisfaire pas mal de monde. Seulement, il faut savoir s'y faire. El Kala, improprement qualifiée de ville touristique, ne dispose pas des plus élémentaires des infrastructures touristiques avec un développement local qui a trame les lubies de décideurs mégalomanes, elle est en train de perdre définitivement ce qui est son unique attraction touristique, sa nature sauvage et ses paysages », nous dit un universitaire algéro-canadien dépité par l'état dans lequel il a retrouvé la région qu'il n'a pas revu depuis 15 ans. Depuis des lustres, on nous assomme avec des slogans creux à résonance politique. Non seulement ils n'ont rien apporté au tourisme national mais, mais en plus, ravagé à coup de bulldozers ce qui devait être une attraction pour une véritable industrie touristique locale. Le parc national d'El Kala, aire protégée qui devait promouvoir le tourisme vert, n'existe plus en tant que telle. il est devenu virtuel.