Monalouisa, la nouvelle pièce de Tounès Aït Ali, produite par le Théâtre régional de Batna, s'inspire, comme son nom l'indique, presque déjà de «La Joconde», l'œuvre majeure du peintre italien Leonardo Da Vinci, réalisée vers 1506. Présentée samedi après-midi au Théâtre régional Azzedine Medjoubi, à la faveur de la compétition du 4e Festival national du théâtre féminin de Annaba qui se déroule jusqu'au 12 mars, la pièce est une première expérience de traitement dramatique pour la critique Djamila Mustapha Zegaï. «C'est un manière pour moi de pratiquer la critique théâtrale de l'intérieur. Une expérience merveilleuse», a expliqué cette enseignante d'art dramatique qui a réécrit un texte de l'Egyptien Saïd Nasr Salim. «Au musée du Louvre de Paris, je suis restée presque trois heures à admirer dans le silence le tableau de Mona Lisa. C'est là qu' est née l'idée d'adapter une histoire algérienne. Nous avons donc traité le texte très poétique en arabe classique de Saïd Nasr, pour dégager des personnages parlant en arabe populaire et sortir de la déclamation. Nous avons créé le personnage de Zbida et Mona Lisa est devenue Monalouisa, l'Algérienne qui parle de sa société et de la femme dans la politique», a souligné Tounès Aït Ali. Un peintre (Hocine Benchmissa) est aux prises avec deux femmes, l'une réelle, l'autre virtuelle. Zbida (Souad Khelfaoui), son assistante, fait tout pour qu'il s'intéresse à elle, l'aime, l'entoure de sa tendresse. Monalouisa, ou la femme figée dans un tableau (Ryma Attal), aimée par l'artiste peintre, plaide pour sa liberté. Elle est là pour lui rappeler les réalités amères du monde des hommes, les hypocrisies, les drames et les folies. La scénographie de Mourad Bouchhir est dynamique ; trois chevalets en déplacement presque continu pour suggérer sans doute l'évolution psychologique des trois personnages, sinon leurs délires. Mais le déplacement répétitif des éléments scénographiques a alourdi quelque peu le spectacle élaboré déjà à partir d'un texte dégageant une certaine confusion psychodramatique. «La confusion peut se comprendre puisque le texte est inspiré d'une toile où monde virtuel et monde réel se superposent. Il faut savoir que le texte d'origine est littérairement dense, écrit en 70 pages et concerne des personnages italiens. J'ai préféré l'adapter au contexte algérien. La pièce porte beaucoup d'interrogations sur les conditions humaines et sociales», a relevé Djamila Mustapha Zegaï. Un léger décalage est apparu entre l'interprétation de Hocine Benchmissa, le jeune comédien de Sidi Bel Abbès qui promet, de Souad Khelfaoui, une habituée du théâtre d'expression amazighe, et Ryma Attal, qui monte sur scène pour la première fois dans une pièce de théâtre pour adultes. Monalouisa, qui peut faire partie du registre de la comédie noire, tente d'explorer ce rapport toujours compliqué entre l'homme et la femme et entre la femme et l'homme. Tounès Aït Ali, qui adore le prologue dans les représentations scéniques, a choisi une chorégraphie conçue par Toufik Kara. «Cette expression corporelle est le résumé de tout ce qu'on va voir dans la pièce. Sur chaque mot nous avons mis un geste. J'aime bien cette belle image au théâtre quand les comédiens dansent, chantent et jouent. Je n'aime pas l'univers statique», a expliqué la metteur en scène. Djamila Mustapha Zegaï a plaidé, à partir de son expérience avec Tounès Aït Ali, pour la présence des critiques de théâtre dans le processus de conception des spectacles à partir de l'écriture du texte jusqu'à la générale. Une idée à creuser...