Ils étaient plus d'une centaine d'Algériens et de Québécois de différentes origines à rendre hommage, vendredi soir à Montréal, aux victimes du terrorisme islamiste en Algérie. L'événement, organisé par la branche montréalaise d'Ajouad Algérie Mémoires, a réussi, pour cette cinquième édition, à avoir une invitée de marque : l'Algéro-Américaine Karima Bennoune, auteure du livre Your Fatwa does not apply here (Votre fatwa ne s'applique pas ici ou Histoires non dites de la lutte contre l'intégrisme), un recueil de témoignages et de portraits de ceux qui luttent contre l'intégrisme dans les pays musulmans – un combat méconnu en Occident. L'Algéro-Américaine, qui a parcouru une trentaine de pays et interviewé plus de 300 personnes pour écrire son livre, a présenté devant un public attentif quelques-uns de ces portraits avec une attention particulière au chapitre consacré à l'Algérie (le combat, entre autres, de Cherifa Kheddar de l'association des familles de victimes du terrorisme Djazaïrouna, de la jeune Katia Bengana tuée à 17 ans pour avoir refusé de porter le hidjab ou de Amel Zennoune égorgée pour avoir continué à étudier malgré les menaces du GIA à l'époque. Elle déplore que, dans les médias, les décapitations de Daech soient plus visibles que le combat des musulmans contre l'intégrisme. Elle a reconnu, sous les applaudissements des présents, que même s'il n'est pas politiquement correct de le dire, «il est parfois nécessaire de recourir à la violence contre les djihadistes. Demandez-le à ceux qui en souffrent directement». La question du «qui tue qui ?» est revenue pendant les débats. Karima Bennoune a répondu en racontant ce qui est arrivé à Cherifa Kheddar dans les années 1990, quand, en Italie, devant un parterre de journalistes, l'un d'eux l'a accusée d'être une alliée des généraux : «Allez sur le terrain dans le triangle de la mort, à Sidi Moussa, les gens vous diront que c'est tel ou tel terroriste qui a tué leur père, leur sœur…» Sur ce point, Leïla Lesbet, militante laïque et membre du Conseil du statut de la femme du Québec, a rappelé qu'elle était avec Cherifa Kheddar dans cette mésaventure : «On nous a traitées d'éradicateurs, alors que ce sont les islamistes qui tuaient.» Pas naïve, Karima Bennoune intervient : «Oui, il y a eu des exactions de la part des services de sécurité.» A cette occasion, à l'initiative d'Ajouad Montréal, les présents ont adopté par acclamation une motion demandant «l'institution d'une journée nationale contre l'oubli en souvenir des victimes du terrorisme intégriste et en hommage à leur sacrifice». A rappeler qu'Ajouad Algérie Mémoires est une association basée en France, cofondée par le fils du journaliste et chroniqueur Saïd Mekbel, assassiné le 3 décembre 1994 et Amel Fardeheb, fille de l'économiste Abderrahmane Fardeheb, assassinée le 26 septembre de la même année.