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2014 : année de turbulences et de remises en cause
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Publié dans El Watan le 13 - 04 - 2015

L'année 2014 se présentait comme celle de l'espoir et de tous les dangers, le plus sérieux concernait la situation géostratégique que nous laissons à nos politologues pour analyse et prospective. Mais en matière de politique économique, on s'attendait à l'une des deux alternatives.
Soit les décideurs actuels seraient reconduits et ils devraient faire une évaluation de l'ensemble des décisions et programmes passés afin d'en situer les forces, les faiblesses (fameuses analyse SWOT) et prendre des mesures correctives pour le prochain mandat. Le deuxième scénario considérait que l'opposition serait au pouvoir et donc irait automatiquement révolutionner les politiques économiques du pays. En tout état de cause, on s'attendait à une reconsidération profonde des choix et des pratiques du passé. Certains la voyaient comme un début d'espoir d'une meilleure maîtrise des grands équilibres macroéconomiques, mais hors hydrocarbures.
En fait, il fallait surtout diversifier l'économie productive et améliorer l'efficacité de l'utilisation des ressources.
Depuis l'an 2000, la seule démarche consistait à injecter massivement des ressources (plus de 500 milliards de dollars) pour moderniser les infrastructures. Les résultats furent décevants par rapport aux immenses ressources injectées ; la disproportion est criante. C'est là où on attendait nos experts publics : expliquer le peu de résultats et fournir des pistes correctives. On devait donc identifier les vulnérabilités les plus importantes et fournir des ripostes à la hauteur des défis. La faible croissance, l'explosion des importations, le glissement du dinar et les mécontentements sociaux malgré les efforts gigantesques de l'Etat (logement, emploi, etc.) constituaient les cibles les plus indiquées des politiques économiques futures.
Les premiers choix économiques
Il ne faut point accorder trop de crédit aux affirmations durant la campagne électorale. Aussi bien l'opposition que le régime en place promettent monts et merveilles aux électeurs. On ne peut pas tirer des conclusions sur la base des déclarations et des programmes présentés. Nous avons des citoyens habitués à des discours de facilité qui privilégient la mise en avant des «droits» avant les devoirs. Quiconque s'écarterait de ce chemin de facilité risque d'être rapidement disqualifié. Mais il est important d'examiner la riposte des pouvoirs publics après la reconduction du gouvernement.
Certes, il y a eu auparavant trois tripartites ouvertes qui avaient essayé de faire le point de la situation, sorte de diagnostic sommaire. C'était un processus qu'il fallait encourager et approfondir. Il a donné lieu à un projet économique et social qui constituait un début de concertation et d'affinement des politiques économiques par l'ensemble des partenaires économiques et sociaux.
Mais 2015 devait être l'année de la mise en œuvre de ce plan d'action. La correction la plus importante introduite dans la conduite des réformes, bien avant la chute des prix pétroliers, concerne le financement de l'économie productive.
Le prochain plan ne devrait plus être à 90% pour les infrastructures, mais devait contenir des mesures de diversification économique : il fallait booster l'agriculture, réindustrialiser le pays et financer les services productifs ; bref, essayer de se départir du tout-énergie et du tout-infrastructures. Ces mesures devaient permettre une croissance crescendo qui irait de 3,5% à 7% à la fin du plan quinquennal. Il fallait gagner 1 à 1,5% de croissance par an pour arriver à ce résultat.
La ré-industrialisation du pays devait être le pivot de cette renaissance économique. L'industrie qui représentait moins de 5% du PIB devait arriver à 10%.
Un défi d'une importance capitale qui allait permettre de réduire une autre vulnérabilité prévalente de notre économie : notre incapacité à exporter. Nous avions les prémisses essentielles de la nouvelle démarche, mais pas les détails. Nous attendions tous la promulgation des détails du fameux plan quinquennal, mais nous eûmes droit à un événement prévisible que nos décideurs n'attendaient pas.
Un plan de riposte au lieu d'un plan quinquennal
La chute brutale des prix pétroliers avait surpris les décideurs en train de préparer un plan quinquennal sur la base de prix pétroliers surpassant les 100 dollars. Certes, on rétorque que les lois de finances sont basées sur 37 $. Mais à ce prix, il y a toujours un grand déséquilibre et il faut faire toute une gymnastique pour situer les conséquences sur le Fonds de régulation et les réserves.
Mais la chute brutale des prix de l'énergie a amené les pouvoirs publics à concevoir un plan de riposte avant d'avoir finalisé le plan quinquennal. Les modifications apportées furent mineures. Il s'agit de retarder la construction de quelques infrastructures non essentielles et opérer un gel des recrutements dans certains départements ministériels. Probablement, on compte sur l'utilisation d'une partie des fonds de réserve et d'une fraction minime des réserves pour s'en sortir. On table plutôt sur un effet transitoire de la situation énergétique dans le monde. Mais si la structure du marché de l'énergie est en partie affectée durablement, alors il faudrait reconsidérer en profondeur toutes les politiques économiques en vigueur.
Il faut attendre que les statistiques détaillées de l'ONS soient rendues publiques pour se prononcer sur les conséquences. On sait déjà que les réserves et le Fonds de régulation vont être interpellés pour au moins 15 milliards de dollars. La croissance ne sera probablement pas au rendez-vous. Nous sommes en situation d'un contre-choc pétrolier.
La production nationale va reculer si les pouvoirs publics ne font rien. Dans ce contexte, un déficit budgétaire est souhaitable pour compenser la chute des recettes budgétaires. Il ne faut pas permettre également à la masse monétaire interne de baisser. La base monétaire doit donc s'accroître. Nos macro-économistes peuvent simuler toutes ces opérations (modèle IS, LM) et ne manqueront pas de le faire. Mais il reste le paramètre le plus important qui est contenu dans la déclaration du gouvernement : rationaliser l'utilisation des ressources. Mais cette préoccupation a toujours constitué le cancer de l'économie algérienne. Aucun gouvernement depuis l'indépendance n'a su insuffler dans nos entreprises et nos institutions non économiques un management efficace qui puisse permettre à l'économie d'utiliser efficacement ses ressources. Tant qu'on n'a pas réglé la question managériale, d'énormes ressources mobilisées produiront toujours des résultats dérisoires.
PH.D en sciences de gestion


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