Le processus de révision constitutionnelle «prendra encore du temps» et ce sera la faute à l'opposition qui «refuse de participer au dialogue». C'est Amar Saadani qui le déclare, sans aller jusqu'à accuser la même opposition d'être à l'origine de la guerre fratricide au sein du vénérable ex-parti unique. Mais il y a des raisons de croire le chef du FLN lorsqu'il s'exprime sur les intentions du pouvoir, dès lors que la conjoncture a fait de lui l'une des voix autorisées, sinon la principale, de l'équipe qui préside aux destinées du pays. Il avait passé, sans coup férir, l'épreuve des attaques frontales contre le patron du DRS sans être rappelé à l'ordre, désavoué, encore moins mis au rebut. Depuis, il «cumule» les fonctions de porte-parole du gouvernement et de la Présidence, tout en laissant sa propre formation politique se décomposer sur la place publique. La révision constitutionnelle, à entendre les prévisions de Saadani, n'est finalement qu'un gadget politique agité par le pouvoir depuis quatre ans pour occuper l'opinion publique, tenter de dessiner quelque perspective politique sans avoir la moindre volonté de la concrétiser. Annoncée dans le discours présidentiel d'avril 2011, réitérée à l'investiture de l'année dernière, la réforme constitutionnelle devait permettre une avancée dans la protection des libertés et un rééquilibrage des pouvoirs pour un meilleur fonctionnement des institutions de l'Etat. Dans l'esprit du pouvoir, ce projet de réformes politiques était un moyen plus «économique» et moins périlleux d'asseoir quelques bases de la démocratie sans être happé ou emporté par le vent des révolutions qui s'était levé dans les pays voisins. Echaudée et édifiée sur la nature du régime depuis la révision constitutionnelle de 2008 ayant supprimé le principe de l'alternance, l'opposition n'a naturellement pas soutenu le chantier politique engagé par le pouvoir. La crédibilité de la démarche officielle est quasiment nulle dès lors qu'un régime dont le règne peut être réduit – en plus d'une gouvernance économique qui a fini par virer à la prédation – à une bataille ininterrompue contre les partis de l'opposition, les syndicats et les associations. Le seul élément de révision constitutionnelle, qui puisse réellement motiver le pouvoir et pour lequel on peut le croire, est le retour à la limitation des mandats présidentiels. Pour un Président qui a un sens aigu de la postérité avec les «projets du siècle» et le minaret le plus haut du monde, il est clair qu'il serait désastreux de quitter le pouvoir sans évacuer de la Loi fondamentale la plaie de la présidence à vie. Même en réarrangeant les lois, il sera difficile, sinon illusoire, pour le système qui plombe le pays depuis des décennies d'échapper au jugement de l'opinion locale et internationale. En plus des déboires judiciaires à l'étranger, les camouflets politiques commencent à poindre, comme la décision exprimée aux Etats-Unis de ne plus accepter les dons de l'Etat algérien.