L'Irak compte chaque jour ses morts, tout en dressant le constat d'une situation qui faisait partie des hypothèses fortes comme cela se dit traditionnellement à chaque coup dur, et le morcellement de l'Irak en est une. Ce processus est même envisagé par la classe politique à l'exception, dans le cadre du fédéralisme, d'un des fondements de la nouvelle constitution. Après le drapeau, voilà donc l'heure des régions. Le Parlement irakien va examiner en effet, un projet de loi controversé présenté par la coalition chiite, prévoyant la création de nouvelles régions autonomes. « Le comité général de l'Alliance unifiée irakienne (AUI) a rédigé un projet de loi sur la formation de régions, et il l'a soumis au président du Parlement pour qu'il y soit examiné », a affirmé hier Hamid Moualla AI Saâdi, député de l'AU I. Ce projet de loi controversé prévoit la formation de nouvelles « régions », regroupant plusieurs provinces — l'Irak en compte 18 —, confirmant le caractère fédéral du pays, affirmé dans la Constitution adoptée en octobre 2005. Les trois provinces du Kurdistan irakien, dans le nord du pays, sont déjà autonomes, depuis la fin de la première guerre du Golfe en 1991. Elles disposent d'une administration commune depuis quelques mois. Une large partie de l'Alliance chiite est favorable à la constitution d'une région autonome pour les provinces du sud du pays, très majoritairement chiites. La division de l'Irak en régions autonomes est vivement combattue par la communauté arabe sunnite, qui craint de se retrouver isolée dans le centre du pays, largement désertique. Les ressources pétrolières de l'Irak, parmi les plus importantes au monde, se situent dans le nord et le sud du pays. Mais l'Alliance chiite (128 députés) et la coalition kurde (53) disposent ensemble de la majorité absolue au Parlement, qui compte 275 sièges. Trop de calculs pour s'emparer du pouvoir ou tout simplement l'exercer. Beaucoup y verront une revanche sur l'histoire, marquée par l'hégémonie de la minorité sunnite et la marginalisation, voire la répression des deux autres communautés, les chiites les plus nombreux, et les Kurdes. Mais à quel prix se demande-t-on encore avec l'intensification des attentats visant les communautés, et non plus seulement l'occupant. Selon certaines statistiques, les victimes des luttes interconfessionnelles dépassent de loin celles liées à la guerre contre ce pays. Et celle-ci, comme le laisse comprendre une décision du commandement britannique, ne connaît pas le moindre répit. En effet, l'armée britannique a annoncé hier que 360 militaires supplémentaires vont être envoyés, à titre temporaire, dans le sud de l'Irak d'ici la fin de l'année. Cette annonce intervient alors que le ministre britannique des Affaires étrangères, Margaret Beckett, effectue sa première visite en Irak depuis sa nomination en mai. Lors d'une conférence de presse avec Mme Beckett, le président irakien Jalal Talabani avait estimé mardi que les troupes britanniques pourraient quitter l'Irak fin 2007. Près de 7200 soldats britanniques sont actuellement déployés en Irak, en grande partie dans le sud du pays, autour de la ville de Bassorah (à 550 km au sud de Baghdad). Sur le terrain, les violences se poursuivent et au moins 10 Irakiens ont été tués hier, tandis que les corps criblés de balles de 19 personnes ont été découverts, ont indiqué plusieurs sources de sécurité et médicales. Six personnes, dont trois soldats, ont été tuées et 46 personnes blessées dans une double explosion à proximité d'un arrêt de bus, dans le quartier à majorité chiite d'AI Qahira, dans le nord-est de la capitale, a annoncé une source médicale à l'hôpital Kindi. Un policier et un civil ont été tués dans deux attaques dans la région de Kout, à 175 km au sud-est de Baghdad, selon la police de la ville. A Baâqouba, à 60 km au nord de Baghdad, une femme travaillant pour le service de relations publiques de la police et le propriétaire d'un magasin ont été abattus au cours de deux attaques, selon la police. La police a découvert, dans différents quartiers de Baghdad, les corps de 19 personnes tuées par balles, apparemment dans des violences confessionnelles qui ont fait des milliers de morts depuis le début de l'année. Qui arrêtera ce plan macabre ?