Le gouvernement de droite à la tête de l'Etat hébreu subit des revers du mouvement BDS, qui mène une campagne de boycott international d'Israël. Pour l'Exécutif juif, cela représente une menace au point où la Knesset lui a réservé une session extraordinaire le 3 juin. Le gouvernement israélien de droite récemment mis en place, semble, aujourd'hui, désemparé, inquiet et craintif. La cause en est le mouvement de boycott international d'Israël (BDS) qui prend de jour en jour plus d'ampleur. Il fait autant de mal aux dirigeants israéliens, parce qu'il s'intensifie dans les sociétés occidentales qu'ils pensaient acquises à jamais. Cette situation est tellement inquiétante pour l'Etat hébreu que certains observateurs israéliens parlent de «danger existentiel». Le président israélien, Reuvin Rivlin, a déclaré que cette campagne de boycott «est équivalente à une menace stratégique». Cette peur a poussé la Knesset (Parlement) israélien à tenir une session extraordinaire, le 3 juin, pour discuter des mesures à même d'atténuer les effets de la campagne sur l'Etat hébreu et des meilleurs moyens de mettre un terme au mouvement de solidarité avec le peuple palestinien, qui ne cesse de grandir dans les sociétés occidentales. La semaine dernière, la campagne BDS a réussi à assener deux grands coups a l'Etat hébreu. Le premier à caractère académique avec l'annonce de la décision de l'adhésion de l'Union nationale des étudiants du Royaume-Uni au mouvement de boycott BDS. Une décision qui a suscité la colère du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, qui l'a accusé d'avoir refusé une demande israélienne formulée un an auparavant de boycotter l'Etat islamique. «Israël est une démocratie exemplaire. Nous avons la liberté académique, la liberté de presse, les droits de l'homme. ISIS piétine les droits humains dans la poussière. Ils brûlent les gens vivants dans des cages et les groupes nationaux des étudiants de Grande-Bretagne refusent de boycotter ISIS mais boycottent Israël», a déclaré le Premier ministre israélien. Le deuxième coup de massue a été l'œuvre de la société française de téléphonie Orange, détenue à 25% par le gouvernement français, dont le PDG a déclaré, mercredi dernier au Caire, vouloir rompre le partenariat avec son homologue israélien Partner, qui utilise son image dans l'Etat hébreu et dans les colonies construites sur des terres palestiniennes occupées. «Notre intention est de nous retirer d'Israël», a dit le PDG d'Orange. Si le gouvernement israélien tente de minimiser l'impact de la décision des étudiants du Royaume-Uni, son premier ministre s'est empressé d'accuser Orange de participer à un «drame absurde», celui dans lequel une démocratie «respectueuse des droits de l'homme» et soumise aux menaces sécuritaires, c'est-à-dire Israël, est confrontée «aux condamnations systématiques et aux tentatives de boycott». «On ne pardonnera pas ce drame absurde», a-t-il martelé. Il appelle le gouvernement français à rejeter publiquement les déclarations et les agissements malheureux d'une compagnie dont il est en partie propriétaire. Cinq ONG et deux syndicats français avaient demandé à Orange, en mai dernier, d'annoncer son désengagement et de dénoncer les atteintes aux droits humains commises par Partner, qu'ils accusent de renforcer les colonies et de contribuer à leur maintien en leur fournissant ses services. Le ministre français des Affaires étrangères a tenté, vendredi, d'atténuer la colère israélienne. «S'il appartient au président du groupe Orange de définir la stratégie commerciale de son entreprise, la France est fermement opposée au boycott d'Israël», a souligné Laurent Fabius dans un très bref communiqué. Mais, en même temps, il a signalé le refus de la France de la construction de colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés. Cette colonisation que le gouvernement israélien s'obstine à poursuivre, y compris dans la ville sainte d'El Qods (Jerusalem-Est) est considérée illégale par l'ensemble de la communauté internationale qui la considère comme un obstacle majeur à l'aboutissement d'un accord de paix entre Palestiniens et Israéliens. Le mouvement BDS (Boycott, Desinvestissement, Sanctions), lancé formellement par 171 ONG palestiniennes le 5 juillet 2005, se réfère explicitement aux campagnes de boycott conduites contre le régime d'apartheid d'Afrique du Sud. Il appelle à exercer des pressions sur l'Etat d'Israël jusqu'à ce qu'il se conforme au droit international et notamment aux résolutions de l'ONU. La campagne a pris de l'ampleur et une forme de plus en plus organisée, réussissant à s'installer en Europe en attirant beaucoup de sympathisants. Aujourd'hui, BDS est devenue la bête noire d'Israël, qui n'a pas trouvé les moyens de lui faire face dans des sociétés occidentales démocratiques Les accusations israéliennes contre BDS d'antisémitisme, ou de travailler pour délégitimer l'Etat hébreu n'ont pas abouti. La propagande présentant Israël comme l'éternelle victime menacée par ses voisins, ou comme la seule démocratie dans la région portant les mêmes valeurs que l'Occident, semble aujourd'hui sans effet sur des sociétés qui ont découvert son visage hideux, celui de l'occupation, de l'oppression et des massacres des populations palestiniennes durant plus de 67 ans.