Tony Blair vit une fin de règne des plus scabreuses. Contesté dans son propre camp, le ministre travailliste est au plus bas dans les sondages, à plus de trois ans des élections législatives. Le tabloïd The Guardian fait ressortir, dans un sondage publié hier, que plus de la moitié des Britanniques veulent qu'il quitte ses fonctions avant la fin de l'année. De plus, le duel à fleurets mouchetés que se sont livrés Gordon Brown et le locataire du 10, Downing Street, n'est pas étranger à ce remue-ménage tout british. Toutefois, son ministre des Finances ne gagnerait pas les faveurs des lectorats échaudés par près de dix ans de règne. Ainsi des sondés affirment que le parti travailliste doit proposer « quelqu'un d'autre » pour espérer garder les rênes du pouvoir exécutif en Grande-Bretagne. Le 10, Downing Street ne manquerait pas de tomber dans l'escarcelle de la droite. La guerre en Irak et le suivisme dont s'est fait connaître le « caniche » de l'« Uncle Sam » seraient une explication tenable à ce positionnement dans l'opinion publique britannique, toujours soucieuse de son image à l'extérieur. Voulant conjurer ce sort, Antony Blair a appelé, hier, lors d'une cérémonie marquant le dixième anniversaire du Progress Organisation, un think-tank proche d'Antony Blair, à « ressouder les rangs » autour de sa personne. Il ne manquera pas de lancer un clin d'œil à son alter ego, lequel a accepté en 1997 de lui laisser le terrain libre après que le premier l'ait nommé chancelier de l'Echiquier, l'équivalent de notre grand argentier. Pour lui, le New Labour a été mis sur pied avec le concours de Gordon Brown. « Le New Labour a été le produit de moi-même et Gordon assis pendant de longues sessions en travaillant pas seulement sur les idées et la politique, mais la structure grâce à laquelle un parti travailliste moderne pouvait gouverner », insiste le Premier ministre. Ce dernier rappellera que l'une des raisons de leur victoire après des années de frustration fut ce projet auquel les deux ont donné expressément naissance, mais qui lui est resté collé : le blairisme. Lequel, après la suppression de la clause socialiste dont a hérité le parti depuis 1918, vise à combiner « efficacité économique et justice sociale ». Cet ancien étudiant en droit du St John's College ne comptera pas laisser le jeu facile à ses détracteurs. Des irréductibles, l'accusant d'ailleurs d'avoir engagé des deals avec des hommes d'affaires, le pressent de passer les commandes à Gordan. « Le très honorable », terme par lequel ce natif d'Edimbourg est connu de ces concitoyens, toujours frivoles, n'aurait guère une quelconque efficacité. Alors que les élections sont prévues pour 2009, le voilà qu'il annonce son intention de quitter son poste « dans les douze prochains mois ». Des mauvaises langues lui prêtent le vœu de battre le record de longévité détenu par Margareth Thacher, qui est restée au pouvoir plus de onze ans. Tandis que la tension est montée d'un cran dans son pays, Blair lorgne du côté du Proche-Orient. Il a commencé une visite en Israël au cours de laquelle il s'entretiendra avec son homologue Ehud Olmert. Le président palestinien Mahmoud Abbas est aussi dans son agenda. A l'ordre du jour de cette rencontre, la situation dans la région et l'éventualité de relancer un processus de paix moribond. Des voix se sont élevées, côté palestinien, pour dénoncer la venue de Tony Blair. Ismaïl Haniyeh, Premier ministre Hamas, déclare ainsi son opposition à la venue de Tony Blair. S'y ajoutent à cette voix dissidente celles des intellectuels qui l'ont déclaré persona non grata. Dans une pétition signée, ces personnalités politiques palestiniennes l'accusaient de chercher à « apparaître comme un homme de paix après les dures critiques essuyées dans son pays et partout dans le monde pour son refus d'œuvrer à un cessez-le-feu au Liban afin de donner le temps aux généraux israéliens d'achever leur mission destructrice ». Par ailleurs, le ministre de Sa Majesté fera un crochet par Beyrouth, où il rencontrera son homologue libanais.