Ce sont des milliers de travailleurs qui continueront à percevoir des salaires de moins de 18 000 DA. L'application de la décision relative à l'abrogation de l'article 87 bis du code du travail fixant le salaire national minimum garanti (SNMG) annoncée pour le mois d'août ne changera pas grand-chose à leur situation de précarité vécue au quotidien. Une grande partie des «corps communs» du secteur de la santé, constitués par les opérateurs professionnels, les travailleurs de l'administration, les femmes de ménage, les ambulanciers et autres travailleurs ne verront aucune incidence sur leurs salaires. Le syndicat UGTA des corps communs dénonce «la poudre aux yeux» que constitue cette annonce. «L'abrogation de l'article 87 bis n'a en réalité aucune incidence sur la valeur du salaire national minimum garanti. Il s'agit en réalité d'une légère augmentation de l'indemnité forfaitaire compensatrice (IFC) qui oscille entre 690 et 3200 DA», révèle Mounir Bitraoui, secrétaire général de ce syndicat qui explique que 51 000 salariés de la santé publique continueront à toucher moins de 18 000 DA en dépit du décret abrogeant l'article 87 bis. L'Etat est donc le premier employeur à attribuer des salaires de moins de 18 000 DA. Ils seraient 120 000 salariés de la Fonction publique à être dans cette situation, selon ce syndicaliste qui double d'activités en prévision de la création d'une fédération des travailleurs des corps communs de toute la Fonction publique. Des salaires de 7000, 12 000 DA et 14 000 DA seront légèrement augmenter, mais n'atteindront jamais les 18 000 DA comme supposé avec la redéfinition du SNMG. Ces salaires sont, faut-il le souligner, ceux des travailleurs permanents et ne concernent pas les autres formules de recrutement temporaire ou d'insertion professionnelle non concernées par cette disposition. Le secteur de l'administration connaît la même situation. Les travailleurs communaux dénoncent une «trahison». Après plusieurs années de négociations, les corps communs du secteur des communes n'ont pas eu droit aux augmentations salariales promises. «L'IFC revalorisée est obsolète face aux salaires de misère que nous percevons», lâche Djamel Bouariche, du Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (Snapap). Selon ce syndicat, 65% des travailleurs des communes touchent des salaires de moins de 18 000 DA et bénéficieront de la hausse de l'IFC allant de 690 à 3200 DA. «Le décret en question ne stipule aucune augmentation pour les salaires de moins de 18 000 DA. Il redéfinit uniquement le SNMG», explique le même syndicaliste. Dans le secteur de l'éducation, les agents de sécurité et les employés de l'administration ne se font aucune illusion. L'amélioration des salaires ne se fera pas à travers la revalorisation du SNMG, «mais avec la révision du statut particulier des travailleurs de l'éducation qui est très injuste envers les corps communs du secteur», explique Messaoud Amraoui de l'Union nationale des personnels de l'éducation et de la formation. 690 DA d'augmentation pour un salaire de 4000 DA «Il est inadmissible que les travailleurs du secteur public continuent à toucher des salaires de misère. Nous n'allons pas nous taire. Nous allons reprendre la protestation dès la rentrée», menace M. Bitraoui. Des discussions sont actuellement en cours pour la création d'une fédération afin de permettre à cette couche, représentant la couche défavorisée, de se battre pour un vrai SNMG à 18 000 DA. «Détrompez-vous, il y a toujours des salaires de 4000 DA pour des employés de l'APC qui occupent des postes permanents», révèle M. Bouariche, qui dénonce également les manœuvres d'intimidation visant les syndicalistes luttant pour les droits de ces travailleurs. Le nouveau décret visant le réaménagement du SNMG sera exécutoire avec effet rétroactif depuis janvier 2015. Selon M. Kacimi, ancien directeur des ressources humaines à la Caisse nationale des assurances sociales (CNAS), le décret redéfinit le SNMG comme comprenant le salaire de base, les indemnités et primes de toute nature, à l'exclusion de celles se rapportant aux remboursements de frais engagés par le travailleur, à l'expérience professionnelle ou toute indemnité rémunérant l'ancienneté. Pour cet ancien DRH, le décret ne définit pas la valeur du SNMG comme étant égale à 18 000 DA. «Il faut attendre les directives données aux DRH et autres responsables chargés de verser les salaires pour savoir ce qu'il en est réellement», explique-t-il.