Confrontée à une rechute des cours du Brent qui risque de ne pas de s'estomper de sitôt, l'Algérie a décidé d'aller se plaindre auprès du secrétaire général de l'Opep, le Libyen Abdallah Al Badri. Selon des informations rapportées par The Wall Street Journal, le ministre de l'Energie, Salah Khebri, a adressé une lettre au secrétaire général de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), dans laquelle il se plaint de la nouvelle baisse des cours du pétrole, laquelle rechute pourrait «justifier de nouvelles discussions sur la stratégie du groupe», rapporte la même source. L'audacieuse missive de Salah Khebri au secrétaire général de l'Opep prend la forme d'un appel pressant à une réunion extraordinaire de l'organisation, susceptible de rétablir les équilibres du marché pétrolier. Dans sa lettre, celui qui a accusé la presse d'avoir «déformé» ses récents propos quant à la nécessité d'une réunion extraordinaire de l'Opep pour protéger les prix évoque le besoin «de nouvelles discussions», justifié par la rechute des cours du brut. L'on est à un cheveu près d'un appel sans ambages à une entrevue extraordinaire des membres de l'Opep. Le très influent The Wall Street Journal rapporte dans son édition de jeudi que le ministre de l'Energie s'était plaint du niveau des prix qui ont fortement chuté depuis que l'Opep a décidé, en juin dernier, de maintenir inchangé son plafond de production. Passé de 62 dollars en juin à 47 dollars actuellement, le baril de brut a perdu 15 dollars de sa valeur en un laps de temps de deux mois seulement, un niveau de prix qui pourrait, selon Salah Khebri, légitimer une intervention de l'Opep. En effet, dans son écrit adressé à Abdallah Al Badri, le ministre de l'Energie demande à l'Opep «d'envisager une action», sans que des détails viennent expliciter la nature de l'intervention souhaitée par Alger, écrit The Wall Street Journal. Selon certaines indiscrétions, l'Algérie milite pour l'amorce de tractations avec les producteurs non-Opep à même de parvenir à rétablir les équilibres du marché. En interne, les équilibres budgétaires sont rompus depuis maintenant plusieurs mois. Pour 2015, le prix d'équilibre du baril de pétrole pour l'Algérie est de 111 dollars. Cependant, depuis la mi-juin, les cours du brut ont dévissé, chutant de 110 dollars à moins de 50 dollars, perdant 60% de leur valeur en quatorze mois. Cette dégringolade spectaculaire des prix a entraîné la détérioration des positions financières extérieures du pays. Et ce n'est peut-être pas encore fini, puisque bon nombre de spécialistes et experts prédisent que la chute des prix allait être de longue durée. Au sein de l'Opep, les appels de l'Algérie à repenser la stratégie du groupe face à la chute des prix risquent de faire pschitt. Les poids lourds du groupe, menés par l'Arabie Saoudite, demeurent inflexibles dans la politique de défense de leur part sur l'échiquier pétrolier mondial. Des représentants de pays membres de l'Opep ont déjà fait part de leur opposition à toute intervention sur les prix. Pis, des pays de l'Opep, dont l'Arabie Saoudite et l'Irak, pompent bien au-delà de leurs quotas respectifs, portant la production globale de l'Opep à près de 32 millions de barils/jour, contribuant ainsi à la situation de surabondance de l'offre dont souffre le marché. Il s'agit aussi d'une stratégie de défense de leurs parts. Les plus fragiles de l'Opep, l'Algérie, l'Angola, la Libye, le Nigeria et le Venezuela en l'occurrence, foncent droit dans le mur, faute d'une économie de substitution à la rente pétrolière. D'où le cri de détresse traduit dans la lettre de Salah Khebri au SG de l'Opep.