Des dizaines de chauffeurs de taxi exerçant dans la ville de Béjaïa ont organisé, mercredi matin devant le siège de l'APC, un «cortège jaune» en signe de protestation contre les mauvaises conditions d'exercice de leur métier et la concurrence déloyale que leur livrent les prestataires clandestins. L'action, à laquelle a appelé le syndicat des taxis affilié à l'UGTA, a duré quelques heures et a été accompagnée de la remise d'une plateforme de revendications au Président de l'APC. Des revendications qui, il faut le signaler, ne datent pas d'aujourd'hui, puisqu'elles ont été épisodiquement remises sur le tapis au cours d'actions antérieures. Mais la situation semble devenir intenable, avec la prolifération des taxis «clandestins» qui disputent les clients aux taxis agréés, alors qu'ils ne sont soumis à aucun impôt. «Nous payons nos impôts, nous appliquons la réglementation à la règle, et au final nous ne récoltons que les miettes des clandestins qui ne payent même pas d'impôts», peste un chauffeur de taxi, rencontré sur son lieu de stationnement, au quartier Daouadji. Le nombre de «fraudeurs» est estimé à plus de 1600 au niveau de la ville de Béjaïa, selon le syndicat des taxis. «A Béjaïa, nous ne sommes qu'une poignée, à peine 280 taxis agréés. Le nombre de clandestins, par contre, dépasse tout entendement : plus de 1600 et ce chiffre est loin de la réalité eu égard à l'ampleur sans cesse grandissante du phénomène. C'est inadmissible !» s'est exclamé le président du syndicat des taxis, mercredi, sur les ondes de la radio locale. Tout en dénonçant l'attitude «laxiste» des autorités, le syndicat des taxis les appelle «à sévir afin de stopper ce phénomène qui menace notre gagne-pain». Il est vrai que, depuis quelques années, le nombre de transporteurs clandestins a décuplé à Béjaïa. Il y a encore peu de temps, ces derniers étaient peu nombreux et se faisaient discrets, en plus de recevoir des visites inopinées des services de sécurité. Le relâchement des autorités, conjugué à la dégradation des conditions de vie des ménages, a fait que le nombre de candidats au transport informel a augmenté considérablement. Des stations improvisées voient le jour à tout-va, au nez et à la barbe des services de sécurité. Dans le lot, beaucoup fraudent pour arrondir leurs fins de mois, tandis que d'autres en font carrément leur métier faute d'activité régulière. «Je suis diplômé d'université et je suis au chômage depuis 4 ans. En attendant une embauche, je fraude avec la voiture de mon père afin de subvenir à mes besoins et ne plus dépendre de mes parents financièrement», indique Omar, 25 ans. Dans ces conditions, la passivité des autorités ne peut s'expliquer que par l'appréhension des incidences d'un coup de pied dans la fourmilière. C'était le cas, le mois de Ramadhan dernier, avec les commerçants ambulants aux exigences desquels l'APC s'est pliée, en les installant sur l'aire jouxtant le siège de la wilaya, après qu'ils aient brûlé des pneus. Question tarifs, les prix pratiqués par les «clandestins» ne diffèrent pas de ceux des taxis. On paye, par exemple, 150 DA aussi bien au fraudeur qu'au taxi pour une course entre Daouadji et Sidi Ahmed. Mais le hic est que l'informel échappe complètement au fisc, ce qui fait des taxis agréés des perdants de facto. En sus de ce problème de taille, l'exercice du métier de taxi dans la ville de Béjaïa souffre de plusieurs carences. On déplore, entre autres, l'absence d'une gare. Actuellement, à l'exception des quelques chanceux qui profitent du parking de la gare routière, tous les autres taxis ont la chaussée en guise de station. Des espaces que les autonomistes respectent rarement, surtout quand on sait que la ville manque cruellement d'aires de stationnement.