Mal desservies en matière de transport en commun, plusieurs localités de la capitale sont difficiles à rejoindre dès la tombée de la nuit. Les citoyens sont dans l'obligation de recourir aux taxis clandestins. Ils sont là à la rescousse des voyageurs retardataires. On peut les apercevoir aux abords des gares routières et ferroviaires, à proximité des stations de taxis et de bus ou encore à la sortie des hôpitaux... En somme, « les stations » improvisées par ces chauffeurs clandestins sont partout dans les différents quartiers de la ville. Qui sont ces taxis clandestins que l'on surnomme souvent « les fraudeurs » ? Pourquoi les passagers utilisent ce mode de transport ? Afin de répondre à ces deux questions, nous avons fait un déplacement avec un chauffeur activant dans l'illégalité. Nous avons pris place à bord d'une petite voiture de trois cylindrées, à côté d'Amine. Ce jeune chômeur nous a conduits de la place du 1er Mai à la place des Martyrs aux alentours de 22 h, heure à laquelle les transports en commun se font très rares. La prestation offerte par ce dernier s'avère être moins coûteuse qu'un taxi réglementaire : 20 DA pour ce trajet. « Nous n'appliquons pas le tarif de nuit », a-t-il ironisé. En attisant la discussion, Amine a fait savoir que « ce sont généralement des chômeurs ou des employés à faibles salaires qui exercent dans ce créneau informel pour arrondir leurs fins de mois ». Pendant le trajet, d'autres personnes montent et développent la conversation en apportant leurs témoignages : « Heureusement qu'il existe les clandestins, autrement, je serai obligé de passer la nuit dans un hôtel alors que je travaille à 20 km de chez moi ». Il fait savoir qu'il prend ce genre de transport depuis 6 ans, lui qui travaille à Bab Ezzouar et habite Bab El Oued. « Beaucoup de citoyens sont même abonnés chez ces clandestins et les appellent en cas de besoin urgent », a-t-il ajouté. Au niveau du square Sofia, (Grande-Poste) monte un autre passager. Il raconte une anecdote : « J'ai fait la comparaison entre les sociétés de taxis et les clandestins et j'ai constaté que ces derniers sont plus sérieux. J'ai appelé une société, on m'a promis de m'envoyer un taxi dans quelques minutes, mais j'ai attendu plus d'une heure, en vain. J'ai alors sollicité un clandestin qui est arrivé au moment voulu. Plusieurs de mes amis font la même chose », a-t-il souligné. « Je termine le travail parfois à 23 heures et je suis obligé d'appeler un clandestin pour me déposer chez moi à Bologhine », précise-t-il. Nombreuses sont aussi les familles qui sollicitent les services des clandestins : « Loin de généraliser, les chauffeurs de taxi sont des fonctionnaires, ils évitent les heures de pointe et le travail de nuit. Mais les clandestins travaillent tout le temps ». A la place des Martyrs, une vingtaine de clandestins sont là à attendre les clients. « Le clandestin a toujours existé pour combler le déficit des taxis », a indiqué l'un des « noctambules » soulignant que « la majorité des clandestins demandent à travailler dans les règles, mais le réseau est saturé d'après la Direction des transports ». Pourtant, les clandestins possèdent des véhicules flambant neufs, beaucoup d'entre eux veulent que leur activité soit légalisée. « Notre activité s'impose » dira un autre, sachant que les opérateurs privés de transport en commun ne desservent pas certaines destinations de la ville sous prétexte que ces lignes ne sont pas rentables.