Un véritable cri de détresse a été lancé avant-hier par les équipages des navires de la marine marchande Nememcha et Nedroma, appartenant à la CNAN (Compagnie nationale de transport maritime). Accostés depuis le 1er septembre dernier au port militaire de Mers El Kebir à Oran, les deux navires ont été mis en isolement et leurs équipages soumis à une véritable mise en quarantaine. « Les officiers du port nous ont interdit strictement de débarquer des bateaux alors que nous avons quelques marins malades qui nécessitent des traitements. Cela fait quinze jours que dure cette situation. La plupart ont épuisé leurs cartes téléphoniques, et sont coupés de leurs familles. Ce n'est que samedi que l'officier du port est venu nous annoncer que nous avions droit à 3 jours de sortie par mois… », a déclaré un marin, joint par téléphone. En fait, les deux navires, en fin de certification (dont les certificats de navigabilité ont expiré) étaient en arrêt au port de Annaba avant d'être déplacés sur le port de Mers El Kebir. Contacté, M. Boumbar, qui assure l'intérim du poste de PDG, a confirmé la situation difficile des deux bateaux, mais en donnant les explications suivantes : « Les deux navires n'ont plus de certificats de navigabilité. Nous avons eu des problèmes pour leur trouver des places pour la mise à quai. Seul le ministère de la Défense a répondu à notre demande en nous proposant le port de Mers El Kebir, dans une zone restrictive. Une convention a été signée entre la compagnie et le ministère pour que les deux bateaux soient là-bas jusqu'à ce que le comité de participation (CPE) tranche sur leur devenir. Nous avons proposé un projet de partenariat avec des étrangers, et la réponse va être donnée dans une semaine. » M. Boumbar a reconnu que des restrictions ont été imposées aux marins du fait du caractère militaire du port. « C'est le prix à payer pour la sécurité », a noté le responsable. Un prix qui risque d'être très lourd si les vents d'ouest se mettaient à souffler par malheur sur ce port. En effet, toutes les conditions de naufrage du navire Béchar et à son bord 16 marins sont réunies, et rien n'indique que la leçon de ce tragique accident a été tirée. La compagnie vit ces derniers mois une situation des plus difficiles, alors que son conseil d'administration n'a toujours pas décidé d'élire un nouveau PDG (poste vacant depuis le début de l'année) pour reprendre le gouvernail du bateau CNAN. Force est de croire qu'il existe une volonté délibérée de mener, ce qui était considéré comme le fleuron du transport maritime, vers la faillite. Sinon, comment expliquer qu'un bateau de type céréalier de 30 000 tonnes sorti à peine d'un chantier de réparation au prix de 1 million de dollars US soit frété à une société privée pour la modique somme de 2700 USD/jour, alors que sur le marché, le même type de bateau, le frètement coûte 13 000 USD/jour. Hier, l'équipage du navire Millénium Express, âgé de 30 ans, affrété par la compagnie pour le transport des voyageurs, actuellement en panne à Marseille, a organisé un regroupement de protestation devant le siège de la société à Hussein Dey. Les marins, rapatriés aux frais de la compagnie, ont exigé la vérité sur le devenir de leur filiale Maghreb Line, asphyxiée financièrement après deux mauvaises expériences de transport de voyageurs Arielle et le Millénium Express. N'ayant pas eu de réponse, ils ont décidé d'organiser un autre sit-in prévu aujourd'hui devant le siège du ministère des Transports.