L'ancien chef de gouvernement, Ahmed Benbitour, a considéré, hier, que l'Algérie a tous les moyens pour réussir, mais qu'il faut, au préalable, « régler la contrainte politique pour changer la donne économique », et ce en guise de conclusion de sa conférence ayant pour thème « Enjeux de l'entrée de l'Algérie dans une zone de libre-échange ». S'exprimant à l'université d'été qu'à organisée, à Alger, la Confédération des cadres de la finance et de la comptabilité (CCFC) autour du thème « Vers un partenariat amélioré entre le Maghreb et l'Europe », l'ancien chef de gouvernement a indiqué que « très peu de choses pour ne pas dire rien pour l'instant » ont étés faites pour préparer l'Algérie à l'entrée dans la zone de libre-échange à l'horizon 2010. Pour M. Benbitour, l'Algérie, qui a raté la bataille des produits industrielles, a encore cinq années pour se préparer pour la bataille des produits agricoles, et ce en préconisant une coopération avec d'autres pays maghrébins, notamment le Maroc. Le conférencier a tenu à relever, à ce propos, l'entrée des trois pays maghrébins (Algérie, Maroc et Tunisie) à la zone de libre-échange « sans concertation et coopération », même si, dit-il, « le Maroc et la Tunisie n'avaient rien à perdre sur leurs secteurs industriels, mais plutôt à gagner, contrairement à l'Algérie dont le tissu industriel était très important ». Tout en soulignant l'égoïsme européen dans ce partenariat dont les coûts sont immédiats pour les Maghrébins alors que les avantages tardent à venir, M. Benbitour a considéré comme chimérique « la zone de prospérité partagée » à laquelle aspirait ce partenariat entre les deux parties. Et de clamer que l'expérience des premières années de mise en œuvre de ce partenariat « vont à contresens des objectifs déclarés ». Cependant, et ne voulant pas s'arrêter au constat, largement partagé par de nombreux analystes, l'ancien chef de gouvernement a recommandé, entre autres, pour l'entrée dans une bataille concurrentielle « très importante », de déterminer les filières aptes à la concurrence et faire leur mise à niveau, ainsi que la recherche de partenaires « dès maintenant avant que les barrières tarifaires ne soient démantelées ». L'invité de la CCFC, pour qui l'Algérie « manque de vision », alors que le pays « est exportateur net de capitaux et de savoir-faire », a déclaré qu'en termes de négociation, « l'Algérie a l'avantage d'acheter des produits qu'elle peut acheter partout ailleurs dans le monde, alors qu'elle vend aux Européens des produits hydrocarbures qu'ils leur sont difficiles d'acheter ailleurs ». Et d'asséner : « Il suffit juste de bien négocier. » Interpellé par des participants lors du débat pour donner de plus amples détails sur le préalable de règlement de « la contrainte politique » pour le changement de la donne économique, le conférencier a éludé la question, en considérant le thème d'éminemment économique. Le débat sur « la contrainte politique » n'a pas tardé à être relancé puisque, lui succédant, un autre ancien chef de gouvernement, Mouloud Hamrouche en l'occurrence, a, dans une conférence ayant pour thème « Quelle place pour un partenariat Maghreb-Europe dans une économie mondiale globalisée », a abondé dans le même sens en considérant que « seul l'exercice des libertés politiques conduit aux libertés économiques ». Considérant que les déboires des pays du Maghreb sont dus à leurs systèmes de gouvernance et à des mauvais choix politiques, le chef de file des réformateurs a suggéré l'exploration d'autres voies. Pour M. Hamrouche, le constat est sans appel : « Le Maghreb est archaïque, retardataire, et dont les sociétés sont bloquées. » Et d'ajouter : « Pour faire un partenariat avec l'Europe, cela voudrait qu'il ne faudra pas avoir peur des équivalences politiques et économiques. Il faut donc aussi aller vers des systèmes de gouvernances démocratiques. » Il y a lieu de noter, par ailleurs, que durant la matinée, l'ancien ministre Abdelaziz Rahabi a donné une communication sur « Le bilan des dix années de partenariat dans le cadre du processus de Barcelone », alors que Mme Brigitta Kauers, experte aux questions de suivi financier de l'unification allemande, a exposé l'expérience de l'ex-RDA dans la privatisation des entreprises publiques. D'autres communications sont attendues pour cette deuxième et dernière journée de l'université d'été de la CCFC, tenue au siège de la Fondation Friedrich Ebert à Alger.