Lourdeurs administratives, taxes, lobby… Certains concepteurs algériens et chefs d'entreprise peinent à promouvoir leurs produits et n'hésitent plus à quitter le pays. Trouver un partenaire étranger n'est plus une option mais une solution pour bon nombre d'entre eux. «Je me suis lancée dans la création de mobilier design en 2009 à El Achour dans un atelier prêté par un ami. Je n'ai pas fait de démarches administratives au début, j'étais impatiente de créer, raconte Malya Benmadi, artiste et chef d'entreprise. Un jour, un agent des impôts est passé par hasard et m'a posé un tas de questions. J'ai eu de la chance d'être tombée sur une personne compréhensive et à l'écoute, car il m'a expliqué toutes les démarches administratives par lesquelles je devais passer pour créer mon entreprise. Chose à laquelle ne j'avais pas pensé à l'époque. Pour moi, le plus important était de matérialiser mes dessins et donner vie aux objets», dit-elle. Malya a travaillé durant cinq dans la clandestinité «au noir» avant de développer son projet et passer à l'étape suivante, c'est-à-dire déclarer son activité et payer ses impôts. «Je ne déclare pas tous les travaux que je fais. J'ai depuis élargi mon carnet d'adresses et je m'engage davantage dans des projets de courte durée», avoue-t-elle. En Algérie, pour breveter une marque, il faut s'adresser à l'INAPI (Institut national algérien de la propriété industrielle), qui attribue un droit exclusif suite à une invention, un produit ou un procédé. Ce brevet viendra jouer le rôle de garde-fou et protéger l'invention en question pour une durée de 20 ans. Juridiquement, l'invention ne pourra être réalisée, utilisée, modifiée, ou vendue sans le consentement de son propriétaire. «L'Inapi a repris ce qui se fait ailleurs, mais au lieu de s'adapter aux besoins des innovateurs et du consommateur, ils font du copier-coller et s'enfonce dans les lourdeurs administratives», explique un cadre au ministère du Commerce. LABEL Il faut savoir qu'après les 20 années de protection, le brevet tombera dans le domaine public et pourra dès lors être utilisé par des tiers. «Vous avez vu la liste des documents demandés par l'Inapi ? Ça donne tout juste envie d'aller voir l'Ansej et de déposer un dossier pour une pizzeria, ça rapporte bien, plus que de proposer ma création», s'insurge Samir Khalfaoui, concepteur d'une lampe led décorative, qui indique l'heure aux mal-voyants. «Le problème avec le brevet, se sont les inconvénients de la procédure et les taxes au compte de l'Inapi, dont on ignore le montant jusqu'à validation du dossier. Je ne trouve pas cette démarche transparente. Je vais m'engager avec un partenaire étranger pour aller jusqu'au bout de mon projet». L'économiste Djamel Merbah déplore «le retard accumulé par rapport aux pays voisins et regrette de voir dans les salons et foire dans le monde l'Algérie si peu représentée». Il reconnaît que «le Made in Algeria est encore loin d'être une référence, c'est dommage pour les personnes qui ont des idées et les moyens de les mettre en œuvre. Le 23 décembre s'ouvrira la 24e édition de la Foire de la production algérienne, c'est très contradictoire, puisqu'en 20 ans peut de choses ont été réalisées. La récente initiative du FCE n'est pas nouvelle», dit-il. Le Forum des chefs d'entreprises (FCE) a lancé officiellement le label Origine Algérie garantie (OAG) appelé Bassma djazaïria. A travers ce label, «l'entreprise dispose d'un outil permettant l'identification de ses produits, participer à la diversification de l'économie nationale, promouvoir et stimuler la production nationale, favoriser la création d'emplois, réduire la dépendance technologique et sensibiliser le consommateur et lui faire privilégier un acte d'achat utile», précise le FCE.