Le dossier du foncier constitue un véritable défi pours les autorités de la wilaya de Ghardaïa. C'est, rappelons-le, l'attribution d'un terrain dans le périmètre Hadj M'hamed à Guerrara qui a été à l'origine de la déflagration de violence ayant fait 22 morts l'été dernier. Dans cette édition, un dossier relatant les efforts consentis par les pouvoirs publics pour atténuer cette crise du foncier dans le M'zab. Cette question problématique et sensible aura été appréhendée par toutes les parties prenantes à ce dossier. Un consensus a été trouvé pour sortir ce dossier de l'ornière et faire de la distribution de ces 30 000 lots un événement historique. Les membres de l'exécutif, à leur tête le wali de Ghardaïa, Azzedine Mechri, et le très dynamique et énergique P/APW, Daddi Addoune Omar, ont décidé de prendre le taureau par les cornes pour la réussite de cette opération et poussent l'optimisme, en envisageant de procéder à une nouvelle distribution à d'autres bénéficiaires. Nouvelle approche Il a suffi d'une journée de discussions, de débats et parfois de vifs échanges, mais dans les limites du respect de chacun, pour accorder les violons et sortir avec des décisions qui, au bout, sont entièrement dédiées à la concrétisation des légitimes revendications et ô combien depuis bien longtemps attendues par la population, à savoir disposer d'un lot de terrain à bâtir pour enfin vivre dans le respect et la dignité. Il est par ailleurs vrai que ce n'est certainement pas une sinécure pour les responsables locaux de piloter ce très délicat dossier du foncier, à cause duquel, tout au moins selon plusieurs observateurs avertis, la région a vécu de dramatiques événements qui ont failli aboutir à une véritable catastrophe, n'étaient les énergiques décisions prises au plus haut niveau de l'Etat, plaçant celle-ci pratiquement sous état d'urgence et sous l'autorité militaire. Décisions salutaires La reprise en main de la situation sécuritaire a abouti au retour à une vie normale saluée par toute la population de la région. Mais les responsables ont aussi compris que pour faire avancer la région, ils se devaient de mettre en route d'autres chantiers dans tous les domaines du développement. Ce faisant, un important programme de développement a été annoncé, in situ, par le ministre de l'Intérieur, Nouredine Bedoui, installant pour cela une commission interministérielle chargée de son suivi. Cette commission qui doit, selon le ministre de l'Intérieur, se réunir alternativement, à Alger et à Ghardaïa, doit tenir sa seconde réunion le mois prochain pour évaluer les étapes de cet ambitieux programme et prendre les décisions idoines à l'effet d'insuffler du rythme pour accentuer et maintenir cette dynamique de développement. Seulement, de toutes les décisions prises en sa faveur, le citoyen, viscéralement attaché à la terre, reste braqué sur ces attributions de lots de terrain à bâtir, valeur refuge de la dignité absolue à ses yeux. C'est pourquoi il a fallu aux élus de l'APW de Ghardaïa, réunis en présence du wali et de l'exécutif dans la salle de conférences de la wilaya de Ghardaïa, consacrer, mercredi passé, toute une journée de débat à ce dossier qu'il fallait absolument traiter et évacuer de toute urgence. Pour cela, il fallait d'abord apporter tous les correctifs aux nombreux points de discorde relevés par l'exposé fait à l'auguste assemblée par ses deux rédacteurs et spécialistes en la matière, à savoir Abdelkader Araba, président de la commission urbanisme et construction, architecte de profession, et Houdjedj Bahmed, vice-président de l'APW, ingénieur en génie civil. Choix inapproprié Les principaux points d'achoppement résidaient dans les choix de certains sites, situés sur des crêtes abruptes, très difficiles d'accès et au terrain rocheux, dans le problème de la prise en charge financière du bornage et tel que précisé pour El Ménéa et Hassi El Gara, à 270 km au sud de Ghardaïa, (deux communes faisant rang de wilayas déléguées, récemment élevées à ce statut lors du dernier découpage en faveur des régions du Sud et des Hauts-Plateaux), les obstacles rencontrés par les bénéficiaires, d'une part, de la difficulté de reconnaître le lieu et l'emplacement exact de sa parcelle de terrain et de l'autre de la lenteur exagérée dans la remise des documents afférents permettant de faire débloquer les aides allouées par l'Etat. Des engagements fermes ont été pris par les divers intervenants à l'effet de lever toutes les contraintes, dans le respect strict de la loi, à l'effet de permettre et dans le meilleurs délais, à tous les citoyens en droit de bénéficier de ce gigantesque effort de l'Etat dont le faramineux coût, ne saurait être ni éludé et encore moins passé sous silence, de diligemment prendre possession de ses biens. 30 000 terrains Pour rappel, 30 000 lots de terrain à bâtir répartis sur les 13 communes que comptent les 9 daïras de la wilaya de Ghardaïa ont été dégagés par les pouvoirs publics pour faire face à l'exponentielle demande en la matière par la population, dont l'explosion démographique a induit une inévitable tendance à la construction illicite et anarchique, enlaidissant significativement l'environnement urbanistique de la région, connue pour son architecture unique en son genre, classée d'ailleurs par l'Unesco depuis déjà trois décades au patrimoine universel de l'humanité. C'est d'ailleurs cette énorme agression à ce patrimoine qui a fait sortir de ses gonds Azzedine Mechri, le wali de Ghardaïa, qui a carrément mis devant leurs responsabilités les édiles des deux communes de Bounoura et d'El Atteuf, à l'effet de procéder à la démolition systématique de toutes les constructions illicites. «Je vous accorde 15 jours pour commencer à procéder à la démolition de ces constructions illicites. Je suis près à signer tous les arrêtés de démolition que vous me présenterez. Je mets à votre disposition toutes les forces de sécurité que vous demanderez. Le chef du groupement de la gendarmerie de Ghardaïa, le colonel Ali Rouane, est instruit à cet effet et attend que vous le sollicitiez. Prenez vos responsabilités. J'en ai assez d'entendre de mettre tout sur le dos du wali», ajoutant d'une voix ferme et à la limite de la colère : «Ce n'est pas possible d'en être arrivé à ce stade de l'atteinte au domaine public. Il n'est pas exclu qu'il y ait eu des complicités, qu'elles soient passives ou actives, ayant permis à certains de s'accaparer ce qui ne leur appartient pas. Mais le laxisme, coupable ou pas, c'est fini, il faut mettre un terme à ces agissements en procédant à la réappropriation systématique de tout ce qui a été illégalement accaparé.» Reprenant son souffle dans un silence de cathédrale, devant un auditoire médusé par la dureté du ton et du regard, il tonne : «D'ailleurs où sont ces associations qui ne pensent qu'à demander des subventions, où est la société civile ? Il faut secouer le cocotier et redonner à cette région son visage d'antan, son visage de ville de culture, de tourisme et de cette architecture qui a inspiré les plus grands architectes.» Espérant que ce ne soit pas un simple coup d'épée dans l'eau et que cette opération ne soit pas uniquement dirigée envers la population d'en-bas. Si vraiment les pouvoirs publics veulent que le citoyen lambda accepte ces décisions, il faut commencer, pour l'exemple, par s'attaquer aux puissants et aux gros bras de la région. «Pour nettoyer l'escalier, il faut commencer par le haut», dit l'adage populaire, plein de sagesse et de bon sens. Alors, wait and see…