Les efforts déployés par la commission mixte chargée de la répression des fraudes en matière d'alimentation, notamment les viandes et tous les produits présentant des risques d'intoxication sont-ils suffisants ? Au vu de la prolifération des abattoirs clandestins dans la ville de Constantine ces dernières années, on serait tentés de répondre par la négative. Interrogé à propos de ce phénomène, qui constitue une réelle menace pour la santé publique, un responsable du bureau d'hygiène de la commune (BCH) de Constantine, ayant requis l'anonymat, nous a confié que les brigades installées par la direction de la concurrence et des prix (DCP) ne badinent pas avec la réglementation, s'agissant de l'hygiène et la salubrité des produits exposés à la vente et des locaux d'abattage, tout en reconnaissant que celles-ci n'arrivent pas à éradiquer complètement ces lieux qui peuvent être un quelconque local clandestin situé à la périphérie, l'arrière-cour d'une maison de la vieille ville ou bien un hangar délabré. «Des brigades mixtes composées des représentants des services agricoles, de la santé, de l'hygiène et de la DCP, appuyés par des agents de l'ordre, quand ils daignent bien les accompagner, effectuent parfois des sorties inopinées dans certains quartiers réputés pour abriter des abattoirs clandestins, notamment à Souika, Djebel El Ouahch, ou dans le quartier populaire des Frères Abbas, plus connu sous le nom de Oued El Had, et la plupart du temps des saisies sont effectuées et des procès-verbaux dressés», soutient notre source. Force est de constater cependant, poursuit-il, que juste après le passage des contrôleurs, d'autres abattoirs clandestins voient le jour dans ces mêmes quartiers tandis que d'autres ne font que changer de résidence pour aller s'installer ailleurs. Il suffit d'arpenter les ruelles de la vieille ville ou se rendre aux marchés de Oued El Had ou Daksi pour constater que la viande rouge non estampillée se négocie 200 ou 300 dinars moins cher que les viandes proposées sur les étals des bouchers de la ville. Il s'agit le plus souvent pourtant de morceaux nobles de bovins ou d'ovins. Interrogé également sur l'incidence que pourrait avoir eu la fermeture, il y a 18 mois, de l'abattoir de Constantine sur la propagation de ce phénomène, notre interlocuteur nous dira : «Suite à cette fermeture nous avons dû solliciter d'autres abattoirs, l'un dans la commune d'El Khroub et l'autre à Aïn Fakroun dans la wilaya d'Oum el Bouaghi. La pression est devenue forcément très forte sur ces derniers. Les négociants en viandes de la ville de Constantine ont dû subir, par conséquent, des charges supplémentaires de transport et des prix d'abattage excessifs. La voie de l'abattage clandestin pour eux était donc toute tracée». Les marchés réglementés n'échappent pas au phénomène Nous avons pu constater d'autre part qu'en ce qui concerne la volaille, des commerçants de la cité des frères Abbas, mais aussi au marché réglementé de Daksi, se sont spécialisés dans la vente de poulets égorgés et déplumés sur place dans des conditions d'hygiène déplorables. Dans cette atmosphère de crainte générale face aux risques d'intoxication, liés à la consommation de viandes avariées, mais aussi d'apparition de cas supposés ou réels de grippe aviaire, un tel négoce prend des allures particulièrement alarmantes, d'autant qu'il s'agit d'une activité qui s'exerce sans aucun contrôle sanitaire. Notre interlocuteur du BCH, déplore à ce sujet que les services du patrimoine de la commune, en particulier, font preuve de beaucoup de laxisme face à certaines dérives, notamment en ce qui concerne l'abattage et la vente de poulets déplumés et partiellement éviscérés, s'effectuant actuellement par des clandestins au niveau du marché réglementé de Daksi. En plus de l'inconscience des clients qui se risquent à acheter leur viande auprès de ces étals sans hygiène, il faut noter le manque de réactivité des autorités concernées envers ce commerce et l'absence de coordination entre les différents services. Une irresponsabilité dangereuse.