Chaque année, près de 800 enfants porteurs d'une trisomie 21 naissent en Algérie, soit deux naissances par jour. Ces enfants exposés au retard mental peuvent développer de réelles compétences pour peu qu'on leur en donne la chance, sont unanimes à dire les spécialistes. «Un enfant trisomique est capable de comprendre et d'apprendre au même titre que tous les autres enfants. Il lui suffit juste du temps pour assimiler et restituer», relève Mme Mezaour Naït Kaci Faïza, orthophoniste, en marge des travaux de la 2e journée scientifique sur la trisomie 21 organisée, hier, par l'association TRIA sous le thème : «Vivre avec la trisomie, quel modèle de prise en charge» à la faculté de médecine d'Alger. Scolariser aujourd'hui un enfant trisomique relève du parcours du combattant. «Ils n'étaient acceptés ni dans les crèches, encore moins dans les écoles. Certaines structures privées acceptent plus ou moins d'accueillir ces enfants qui ont pourtant les capacités d'évoluer comme les autres élèves», relève une parente rencontrée lors de cette journée scientifique. Pour l'orthophoniste Naït Kaci, il est temps que les pouvoirs publics prennent conscience que ces enfants ont besoin d'un programme adapté pour une réelle intégration et inclusion. «L'éducation vise l'autonomie, une insertion sociale et scolaire pour ces trisomiques. Pour ce faire, le ministère de l'Education doit être impliqué dans ces programmes pour justement donner la chance à des enfants qui évoluent et qui progressent, d'autant que le potentiel intellectuel est variable d'un enfant à un autre. La formation des encadreurs est plus qu'indispensable, on ne peut pas continuer à cloîtrer des trisomiques dans une même classe et qu'ils suivent leurs cours donnés uniquement par des orthophonistes», a-t-elle souligné. Et de préciser que certains d'entre eux peuvent suivre leur scolarité dans des classes normales, tout en étant accompagnés par une auxiliaire de vie scolaire formée. «On peut toujours garder les classes intégrées et donner la chance à tous ces enfants d'évoluer dans la vie scolaire», a-t-elle indiqué. Pour Mme Mezaour, le problème doit être réglé au niveau national et non pas seulement à Alger. De nombreux trisomiques ont besoin d'être mêlés aux autres enfants, notamment pour briser cette différence. «Les ministères de la Solidarité et de l'Education doivent travailler en étroite collaboration afin d'élaborer un programme adapté à tous ces enfants», a-t-elle encore plaidé. De nombreux parents ne comprennent pas pourquoi le ministère de l'Education n'assure pas la scolarisation des trisomiques. «Le ministère de l'Education se contente de mettre à notre disposition les salles de cours dans certaines écoles, mais pas d'encadreurs. Le ministère de la Solidarité affecte des orthophonistes dans le cadre de l'emploi des jeunes, mais sans aucune formation au préalable ni programme pédagogique préétabli», signale un parent d'une petite fille trisomique. Cette dernière est aujourd'hui dans une classe ordinaire et accompagnée d'une auxiliaire de vie scolaire affectée par la Direction de l'action sociale (DAS), et les parents complètent la rémunération selon leurs capacités financières. M. Amourra, ex-membre actif de l'association ANIT, estime que la prise en charge des enfants trisomiques doit être une question nationale et non pas seulement l'affaire des parents. L'association TRIA déplore ainsi le manque d'un personnel qualifié pour la prise en charge de ces trisomiques dont le nombre augmente d'année en année. Les expériences ont montré, relève un membre de l'association, que ces enfants scolarisés ont énormément évolué, dont certains ont été intégrés malgré l'absence de textes réglementaires. C'est grâce à des responsables au niveau de la DAS que nous avons pu nous lancer et nous battre pour ouvrir des écoles au niveau d'Alger et intégrer certains trisomiques dans des classes normales. L'école Benazouz Abdelhamid de Kouba accueille une dizaine d'enfants dans une classe spéciale, mais l'enseignement est assuré par une orthophoniste affectée par le ministère de la Solidarité. Le directeur de l'établissement fait de son mieux pour que ces élèves puissent évoluer normalement dans un environnement éducatif. Pour le président de l'association, Atek Sofiane, cette journée s'inscrit dans le cadre de la sensibilisation des parents et de l'information pour améliorer leur quotidien et assurer l'accompagnement des parents depuis l'annonce du syndrome. Un guide sera justement élaboré afin de répondre à toutes les questions liées à la trisomie 21. L'association assure, en collaboration avec les maisons de jeunes de Bouzaréah et Kouba, de nombreuses activités culturelles et sportives au profit de ces enfants.