La révision constitutionnelle et la restructuration des Services de renseignement sont les deux éléments-clés du projet politique défendu par le président Bouteflika pour son quatrième et probablement dernier mandat. Les deux projets vont ensemble et semblent se compléter. D'où la communication simultanée et dense sur ces deux démarches. Il est évident que le président Bouteflika, qui a entamé sa 18e année à la tête du pays, veut peser sur l'après-2019. Il prépare le terrain à son successeur en renforçant son pouvoir à travers le contrôle sur la communauté du Renseignement et à travers une «démilitarisation» graduelle de la vie politique. La dissolution du DRS va être suivie par une modernisation accélérée du fonctionnement de l'armée. D'où le risque de résistance au sein de l'état-major de l'armée liée à une certaine culture militaire hostile à toute professionnalisation des forces armées et à toute transparence sur le fonctionnement des structures militaires. Le projet portant révision constitutionnelle n'a apporté aucun changement sur le rôle de l'armée dans la vie nationale ni sur celui des services de sécurité. L'«Etat civil» que Bouteflika veut bâtir, selon ses partisans, se fera par étapes. La Constitution aura des dispositions transitoires, mais également des textes de loi pour la rendre applicable. L'intérêt doit se porter sur la teneur de ces textes et sur la durée de leur mise en application. Au-delà de cette situation, les défenseurs du projet de révision constitutionnelle ont tous évoqué l'idée d'ouverture et celle de renforcement des droits et des libertés des Algériens. D'autres ont avancé la thèse de la «modernisation» de l'Etat et de son fonctionnement, oubliant qu'au début de son premier mandat, Bouteflika avait installé un comité qui devait justement faire des propositions sur la réforme de l'Etat et de ses missions, le fameux comité Missoum Sbih. Où est donc passé le rapport détaillé de ce comité ? Ses propositions ont-elles été mises en application ? Puisqu'il est question de libérer quelque peu l'action de l'opposition à travers le projet de révision constitutionnelle et le démantèlement partiel de «la police politique», la Présidence, le gouvernement et la nouvelle communauté du Renseignement sont-ils prêts à «ouvrir» le champ politique, à laisser tranquilles les opposants et les militants des droits de l'homme et des libertés démocratiques ? Sera-t-il plus facile pour les partis, les syndicats et les associations autonomes d'accéder à l'espace public, de manifester pacifiquement dans la rue, d'être à l'antenne dans les médias gouvernementaux ? Sera-t-il aisé pour les professionnels des médias de traiter de tous les sujets et d'enquêter sur tout ? Les juges seront-ils débarrassés des pressions politiques dans leur travail ? La démocratie n'est valable que si elle est pratiquée sur le terrain en continu. Donc, attendons l'adoption puis la mise en application de la nouvelle Constitution pour être fixés…