La sonnette d'alarme a été tirée à maintes reprises lors de chaque célébration de la Journée nationale de La Casbah d'Alger, célébrée le 23 février de chaque année. Le président de la fondation Casbah, Belkacem Babaci, et le vice-président, Réda Amrani, ont animé, hier matin, une conférence de presse au niveau du forum d'El Moudjahid portant sur les opérations de sauvegarde de la médina d'Alger. Le président de la fondation a indiqué que La Casbah d'Alger est en danger, et ce, en dépit des efforts considérables déployés par l'Etat. «La médina, dit-il, est dans un piteux état. L'Office national de gestion et d'exploitation des biens culturels protégés, sous la houlette de Abdelouahab Zakagh, fait de son mieux pour protéger les anciens bâtis. La restauration des douirate nécessite des spécialistes dans le domaine. On veut sauver ce qui reste à sauver, mais les gens qui aiment La Casbah doivent être sur place pour la défendre.» Il révèle que des opérations de proximité ont été engagées par la fondation Casbah. Parmi elles figure l'inauguration d'une bibliothèque baptisée «Petit Omar» et d'une salle de cours pour lutter contre l'analphabétisme destinée aux mamans de La Casbah. Deux cellules d'écoute ont été créées. L'une pour les jeunes ayant une addiction à la toxicomanie, et l'autre pour les propriétaires de bâtisses et les habitants de La Casbah. Belkacem Babaci évoque un autre point de taille : l'Etat propose aux propriétaires de vendre leurs bâtisses. «Il y a eu des propositions qui ont été faites par le ministère, malheureusement à cause de la chute des revenus pétroliers, l'Etat a signifié qu'il ne pouvait plus les acheter», argue-t-il. M. Babaci rappelle que si certaines personnes ayant bénéficié de logements ailleurs quittaient La Casbah, d'autres s'approprieraient des lieux. «Dans les années 80 et 90', La Casbah comptait 36 000 habitants ; après le départ de Rahmani, un autre wali est venu et a tout bloqué. Il a laissé les gens revenir alors qu'il y avait des gardiens du patrimoine. Il y a eu l'apparition d'un véritable commerce. Les chambres se vendaient à petit prix. Aujourd'hui, le recensement est de l'ordre de 62 000 habitants.» De son côté, le vice-président de la fondation Casbah a énuméré d'autres éléments de la situation de la médina d'Alger et des activités de la fondation. Il affirme que l'objectif de la fondation est de préserver cette médina qui est la capitale de l'Algérie depuis 1518. C'est grâce à la fondation Casbah que la médina a été classée au patrimoine de l'Unesco. Le travail de la fondation a abouti en 1998 à la publication d'une loi sur la protection et la réhabilitation du patrimoine. Mais il a fallu attendre jusqu'en 2012 pour que tous les textes d'application soient mis en œuvre. «Pendant ce temps-là, avoue-t-il, la fondation Casbah harcelait les autorités. A chaque fois on nous fournissait des explications bidon pour nous freiner. En février 2012, le gouvernement s'est réuni et a décidé d'un plan de sauvegarde de la médina avec un financement qui n'entrait pas dans le cadre de la loi des finances.» Le conférencier souligne qu'actuellement deux agences s'occupent de la réhabilitation de La Casbah. «Celle de Abdelouahab Zakagh fait de son mieux, tandis que la seconde, l'Agence nationale de sauvegarde n'active pas. Nous avons approché la directrice de cette agence pour lui proposer un protocole d'accord, mais nous n'avons eu aucune réponse.» L'orateur indique que le plan de sauvegarde de La Casbah existe depuis 2006. «On a commencé en 2007 par le plan de consolidation qui a été bien mené. On est passé ensuite au programme de réhabilitation. Ce programme est immense. Les ressources existent. Or, il y a aujourd'hui l'OEGP, une organisation qui n'est pas adéquate en fonction des missions qu'on lui a confiées», ajoute-t-il. Le secteur sauvegardé de La Casbah d'Alger s'étend sur une superficie de 105 hectares, englobant une multitude d'édifices remarquables tels que la Citadelle, les palais, le Bastion 23, Dar El Soltane et autres. Toujours selon l'intervenant, aujourd'hui il faut réhabiliter 450 bâtisses avec toute une infrastructure : l'eau, l'électricité, le gaz et les télécommunications. Le programme s'avère des plus complexes. «Dans une lettre, le Premier ministre a souhaité associer la fondation Casbah à tous les travaux. On ne nous écoute pas d'une façon effective, alors qu'on ne part pas les mains vides.» Il est à noter par ailleurs que les deux interlocuteurs ont émis le vœu de développer l'archéologie marine algérienne et de demander à la France la restitution de tous les biens de l'Algérie, dont le célèbre canon Baba Merzoug, une montre datant de l'époque de Louis XVI, et une météorite de 600 kg.