Regret - «Nous n'avons pas de quoi être fiers, La Casbah est aujourd'hui dans un état lamentable, voire dramatique.» C'est en ces termes que le président de la Fondation, Casbah, Belkacem Babaci, qualifie la situation dans ce vieux quartier rustique. Une situation s'illustrant, entre autres, par «l'environnement pollué, l'effondrement des murs occasionnés par les dernières intempéries et sur le squat des maisons». Cependant, M. Babaci a exprimé son optimisme quant à un éventuel et probable changement de la Medina, surtout après l'adoption du décret exécutif portant sur l'adoption finale du plan de sa sauvegarde. «Le décret exécutif a été adopté mercredi par le gouvernement (ndlr) (…). Le plan de sauvegarde qui a été exposé par la ministre de la Culture, Khalida Toumi, au Conseil des ministres a été finalement accepté», a-t-il expliqué jeudi, lors d'une conférence de presse organisée au Forum d'El Moudjahid à l'occasion de la Journée nationale de La Casbah. En attendant la concrétisation de ces belles perspectives «le moins que l'on puisse dire est qu'il n'y a rien de changé et aucune initiative n'a été engagée depuis 2 ans. L'opération d'étaiement entreprise par l'Office national de gestion des biens culturels, chargé des travaux, devait servir à parer aux éventuels effondrements des murs. Pas plus tard qu'il y a trois jours, nous avons constaté l'effondrement des murs, tels que celui qui s'est écroulé en plein cœur de cette ville à Aïssa Rahmouni à cause de la pluie». Malheureusement, déplore l'intervenant, tout est resté en l'état, et le temps a fait le reste, la poussée des murs a fait que des madriers cèdent graduellement, les murs des bâtisses présentent actuellement des hernies (gonflements), ce qui explique les quelques écroulements constatés. «Il faut ajouter à cela le phénomène des vols, notamment des madriers qui soutiennent les murs, par des voyous qui les revendent à ceux qui bricolent dans la réfection de leurs douirette un peu partout.» Pis encore, des personnes enlèvent «à dessein, les madriers de soutènement pour accélérer l'effondrement de la maison et bénéficier, du coup, d'un logement». Selon les chiffres de la fondation, 1 200 maisons ont été recensées en 1962. Près de 420 se sont effondrées et près de 800 ont été sauvées, dont une centaine méritent d'être réhabilitées. Aujourd'hui, ce patrimoine mondial compte près de 1 800 bâtisses. Pour sa part, le directeur de l'Office national de la gestion et d'exploitation des biens culturels (Ongebc), Abdelouahab Zekagh, a indiqué que durant les trois ans et demi qu'a duré l'étude, des mesures d'urgence ont été prises par l'Ongebc pour sauver 394 bâtisses. «Nous sommes intervenus dans l'urgence sur 394 maisons, douirette dans un état d'extrême dégradation, et nous prévoyons une intervention sur 323 autres en mars prochain.» Le plan de sauvegarde de La Casbah d'Alger, élaboré par l'Onbgec concerne 1 816 maisons sur une superficie de 105 hectares, a, par ailleurs, déclaré M. Zekagh. Selon le directeur du logement au niveau de la wilaya d'Alger, Mohamed Smaïl, La Casbah compte environ 10 000 familles, soit près de 35 000 habitants. Appel au rapatriement des objets mémoriels La Fondation «Casbah» a renouvelé son appel pour le rapatriement du canon Baba Merzoug et de 158 autres objets appartenant au patrimoine mémoriel de l'Algérie qui se trouvent en France. Les membres de la Fondation ont affirmé qu'ils continueront à demander la restitution du canon Baba Merzoug, rappelant que les pourparlers avec les officiels français sont en bonne voie, selon M. Babaci, président de la fondation. Le canon Baba Merzoug, une pièce d'artillerie conçue de 1536 à 1542 à la fonderie de Dar Ennahas à Alger, a été transféré en France comme prise de l'armée coloniale française en août 1830. Baptisé «La Consulaire», le canon Baba Merzoug est depuis exposé au Port de Brest (nord de la France). Le canon «reviendra un jour dans son pays natal. Nous nous y engageons», a réitéré M. Babaci. La Fondation réclame également avec force les crânes de célèbres résistants algériens à la conquête coloniale au début du XIXe. Les crânes de Boubaghla, Bouziane et Derkaoui, entre autres, sont conservés au Musée d'histoire naturelle de Paris. Cent cinquante-huit pièces historiques sont encore dans des musées français, dont les effets personnels du dey d'Alger, selon M.Babaci qui pointe un doigt accusateur en direction du ministère de la Culture, ainsi que de la représentante de l'Algérie à l'Unesco.