L'affaire du projet d'autoroute Est - Ouest vient de prendre un virage à 180° avec la réaction du ministre des Travaux publics, Amar Ghoul, hier au siège de l'APS à Alger. Cette affaire, puisque c'en est une apparemment, qui n'a pas cessé de faire parler d'elle ces dernières semaines, prend l'allure d'un scandale, tour à tour financier et bassement politicien. M. Ghoul est sorti hier de sa réserve pour réagir à ce qu'il qualifie de « rumeurs » concernant les surcoûts du projet de l'autoroute Est - Ouest évalués à 1 milliard de dollars. Réfutant la thèse du scandale financier dans lequel son département et l'Agence nationale des autoroutes seraient impliqués, le premier responsable en charge du projet accuse à son tour certains cercles à l'intérieur et à l'extérieur du pays qui veulent, selon lui, saboter le projet : « Ce ne sont que de simples rumeurs qui tentent d'induire en erreur l'opinion publique », affirme le ministre. « Cette histoire du milliard de dollars qu'on aurait ajouté au coût réel du projet n'est que pure affabulation », lance encore M. Ghoul, visiblement gêné par une telle accusation liée à la réalisation de la plus importante infrastructure autoroutière que le pays ait connue. Il ne niera pas cependant qu'une enquête judiciaire se penche actuellement sur le dossier. « L'enquête suit son cours et la justice a un droit de regard sur ce genre d'affaires, même si au départ il ne s'agit que de simples rumeurs », affirme encore M. Ghoul, sans préciser pour autant l'identité de la partie à l'origine de l'action de justice introduite près le tribunal d'El Harrach. L'on se demande à ce propos si la justice s'est autosaisie pour enquêter sur cette affaire ou a-t-elle été saisie. Les informations qui ont circulé sur cette affaire et reprises par la presse avancent pourtant que c'est le président de la République qui, alerté, aurait ordonné une instruction judiciaire portant sur l'évaluation financière du coût de réalisation et les modalités qui ont été suivies dans l'attribution finale du projet aux deux groupements étrangers, en l'occurrence le groupe nippon COJAAL, retenu pour la partie Est du projet autoroutier, et le groupement chinois CITIC/CRCC pour les tronçons Ouest. Se voulant plus précis, le ministre des Travaux publics a indiqué que « le coût de réalisation de cet important projet autoroutier de 11 milliards de dollars, établi suite à une analyse technique et financière réalisée par un bureau d'études canadien qui accompagne l'ANA, a été approuvé par la commission nationale des marchés publics. Sur les 827 milliards de dinars attribués au projet, 376 milliards sont destinés au lot Est, 192 milliards au lot Centre et 259 milliards au lot Ouest ». Le coût du kilomètre serait ainsi, selon lui, de « 9,95 millions d'euros (environ 955,2 millions de dinars) », soit un prix en deçà des 12,5 à 17 millions d'euros/km appliqués en Europe. Tout en rappelant les différentes étapes suivies dans l'attribution du projet, selon le code des marchés, le ministre a pris le soin d'indiquer que l'Algérie a réussi à faire baisser le coût du projet confié aux deux entreprises chinoise et japonaise. Il notera aussi qu'une autre étude technique et financière menée récemment par une firme émiratie a conclu que le coût « est compatible avec la taille, l'envergure et la complexité du projet ». A ce propos, le ministre dénoncera encore une fois « les pressions et les tirs de tout bord » qui ont été, selon lui, à l'origine des rumeurs concoctées autour du projet. « Il est tout à fait normal qu'une somme aussi importante (11 milliards) attise les convoitises de plusieurs groupes et dérange de gros intérêts », avoue le ministre, sans nommer ces groupes ni préciser la nature des pressions subies. Pour lui, « ce méga-projet dérange en raison des enjeux importants qu'il entraîne et qui mettent leurs intérêts en danger ».