A mi-chemin entre Constantine et Hamma Bouziane, la localité de Békira se cherche toujours après une extension urbaine spectaculaire. Le paisible patelin dépendant administrativement de la commune de Hamma Bouziane, mais dont certains lots de terrain sont encore sur le territoire de la commune de Constantine, n'aura pas bénéficié durant des années des infrastructures d'accompagnement adéquats, surtout que l'agglomération compte aujourd'hui près de 20 000 habitants. Un tour dans la cité donne une idée sur le malaise qui étouffe un ghetto se confondant avec la monotonie. Le Ramadhan n'a rien de spécial à Békira tant que la population reste sevrée depuis des années de la moindre animation. Le fait saillant de ces bâtiments sortis d'un moule unique, c'est-à-dire d'un style architectural uniforme, genre « copier-coller », comme qui dirait l'autre, demeure le nombre impressionnant d'échoppes, où les cafés réussissent à se faire une place pour le grand bonheur des veilleurs durant ce mois. « C'est notre seul moyen de distraction durant les nuits du Ramadhan, où la plupart des résidants s'attroupent autour des matches de football européen grâce, bien sûr, à la parabole, captée avec la carte de la chaîne El Djazeera sport. » Hormis cela, c'est le calme plat dans une cité marquée par la délinquance et l'insécurité. Les jeunes qui se bousculent aux cybercafés pour passer leur temps devant les jeux vidéo n'ont pas vraiment l'embarras du choix. Pas de stade de football alors que les terrains sportifs du type Mateco sont tout le temps fermés. Ce qui pousse les jeunes à jouer dans la rue. Non sans danger, bien entendu. Le tout nouveau club des jeunes de Békira, inauguré en juillet dernier, tente tant bien que mal d'activer avec les moyens de bord. « Nous avons cherché à mettre en place un programme de distractions culturelles et pédagogiques durant les soirées du Ramadhan pour les jeunes des quartiers de Békira qui ont droit à des ateliers de théâtre et des projections de films vidéo, mais ça reste toujours insuffisant », nous dira le jeune Chami qui anime aussi un atelier de dessin dans le club. Les habitants de Békira dont la plupart n'ont pas la possibilité de se déplacer à Constantine, où l'animation concentre l'essentiel du programme, faute de moyens de transport, préfèrent plutôt se terrer chez eux. Des soirées, il n'y en a point. Les multiples agressions nocturnes enregistrées n'encouragent plus les familles à sortir. Pourtant, la cité, qui ambitionne d'avoir un jour le statut d'une commune, ne manque pas de potentialités humaines.