Si au plan diplomatique l'impasse subsiste, sur le terrain, le Front Polisario a multiplié, ces derniers jours, les gestes de bonne volonté : accord pour le passage du Rallye Paris-Dakar et libération de prisonniers marocains. Ce geste humanitaire du président sahraoui Mohammed Abdelaziz, ordonnant la libération de 115 prisonniers marocains, à l'occasion de la nouvelle année et, singulièrement, à la demande du président du gouvernement espagnol José Maria Aznar, a été très apprécié par le diplomate américain William Lacy Swing, nouveau représentant spécial de l'ONU auprès de la Minurso, qui s'en est félicité qualifiant cette libération «de geste humanitaire que tout le monde va applaudir». Arrivé en décembre dernier au Sahara occidental en remplacement de William Eagleton, en fin de mission, William Lacy Swing a pris contact, au courant de la semaine, avec les différents dirigeants sahraouis. Il a rencontré les chouyoukh sahraouis, de même que des responsables désignés par l'ONU lors du recensement des Sahraouis, et des représentants de la société civile. Cette visite in situ a permis au diplomate onusien de s'imprégner de la réalité du terrain et de discuter avec les responsables sahraouis. Le Front Polisario a mis à profit cette rencontre pour faire part au représentant de l'ONU de sa préoccupation quant au sort des 131 prisonniers sahraouis grévistes de la faim détenus à El Ayyoun. M.Swing, qui a dit ne pas ignorer cette situation, a indiqué qu'il était «en train de discuter de cela par la voie diplomatique». Pour ce qui est des prisonniers marocains libérés, le Polisario, tout en mettant ce geste humanitaire dans le contexte de fin de ramadan et de nouvelle année, insistera sur le fait que cet élargissement des Marocains intervient surtout «à la demande du président du gouvernement espagnol José Maria Aznar qui assure actuellement (cf. depuis le 1er janvier) la présidence de l'Union européenne» Il va de soi que Madrid a accueilli, avec une large satisfaction, la libération des prisonniers marocains. Cette libération, indique un communiqué du ministère espagnol des Affaires étrangères, «peut contribuer à un plus grand rapprochement et à donner une impulsion au dialogue et à la confiance entre les parties impliquées dans le contentieux», affirmant: «Le gouvernement espagnol réitère sa disposition à continuer de travailler pendant le semestre de la présidence de l'UE, en accord avec ses partenaires européens et de la communauté internationale, pour essayer de trouver une solution à ce long conflit, y compris les questions humanitaires qui en dérivent, dans le cadre de la légalité internationale et des intérêts et aspirations légitimes de toutes les parties impliquées.» Notons que l'impasse du dossier sahraoui, liée à l'organisation d'un référendum d'autodétermination pour le peuple sahraoui, est occasionnée par le refus du Maroc de prendre en compte les résultats auxquels est arrivée la commission de l'ONU chargée du recensement et de l'identification des électeurs sahraouis, découlant des accords d'Houston signés et avalisés par le Maroc et le Front Polisario. Dans la perspective de dépasser l'obstacle ainsi créé, le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, pour le Sahara occidental, James Baker, -qui initia et mit au point les accords de Houston - tente, aujourd'hui, de revenir sur cet accord en proposant une hypothétique «troisième voie» dont l'essentiel serait l'abandon du référendum au profit d'un «accord-cadre» donnant aux Sahraouis une «autonomie dans le cadre de la souveraineté marocaine» Accord-cadre rejeté par le Front Polisario qui reste attaché au plan de paix de l'ONU et aux accords d'Houston. Ce que vient de réitérer à Madrid, M'hamed Khaddad, coordinateur avec la Minurso -dont le mandat a été prorogé par le Conseil de sécurité jusqu'au printemps prochain - qui renouvela l'attachement du Front Polisario au plan de paix onusien pour le Sahara occidental, appelant les Nations unies à «déployer leurs efforts pour libérer les détenus sahraouis en grève de la faim dans la prison d'El Ayyoun». Le diplomate sahraoui affirmera, par ailleurs, que la visite de M.Swing intervient alors que le processus se trouve «bloqué par le refus du Maroc d'accepter la tenue du référendum d'autodétermination comme décidé depuis des décennies par l'ONU» soulignant: «Nous avons surtout insisté sur la nécessité de reprendre le plus vite possible le processus de mise en application du plan de paix des Nations unies. C'est un impératif pour une paix juste et définitive dans la région.»