L'urbaniste, auteur, poète et moudjahid algérien, Abderrahmane Zakad,78 ans, est décédé, jeudi dernier. Il a été enterré au cimetière de Garidi, à Alger. Pour ceux qui s'en souviennent, le regretté Abderrahmane Zakad était un inconditionnel des rencontres littéraires. Il ne ratait, pour ainsi dire, aucune présentation de livres ou encore de vente-dédicace. Cet homme brave et cultivé à la fois se faisait une joie d'intervenir pour donner haut et fort son appréciation, même si certains n'apprécient pas ses coups de gueule du moment. Il se plaisait à rappeler à ses amis, via la Toile, que la vie est courte et qu'il faut la vivre pleinement et intelligemment. «De préférence avec le rire et les sourires. Si je suis arrivé à l'âge de 78 ans sans encombre ni pneus usés, c'est que je vis de l'humour et de l'amour des gens. J'ai toujours les mêmes bougies et les mêmes vis platinées depuis que la R4-Zakad est sortie de l'usine à sa maman en 1938», lançait-il à ses amis. Abderrahmane Zakad est né en 1938. Diplômé en urbanisme, il fut l' élève de Jean de Maisonseul, de Pierre Salama, de Claudine Chaulet et Djillali Sari. De 1963 à 1968, il est nommé inspecteur principal à la présidence du Conseil. Il a occupé, par la suite, plusieurs postes importants en tant que directeur, notamment à la Cadat et au Cneru (1969-1983), directeur régional de Annaba (1974-1976) (chargé du programme de la wilaya –Annaba-Tébessa-Souk Ahras- Guelma.) (BET Allemand SpeerPlan) - directeur régional Skikda (1981/1982) (chargé de l'aménagement régional de la région de Skikda avec des équipes hongroises et algériennes), chef de projet de la reconstruction de Chlef (tremblement de terre, 1980/1981). Ingénieur subdivisionnaire DUCH - Alger/ Hussein Dey (1983-1986) (responsable réhabilitation du quartier Hamma-Hussein Dey (Alger) et La Casbah. Responsable à l'AADL (études sur les vieilles villes)- 1998-2000. Responsable du suivi de réalisation de la ville nouvelle de Sidi Abdellah (Alger). Il a été également consultant spécialiste en cartographie. Il a, en outre, réalisé des films audiovisuels sur les vieilles villes et quartiers anciens. Plume prolifique, il est l'auteur de plusieurs publications, dont entre autres, Trabendo, roman, éd. Marsa, Paris, 2001, Un Chat est un chat, poèmes, éd. Marsa, 2003 ; Les Jeux de l'amour et de l'honneur, roman Albin Bibliopolis, Alger, 2004 ; Le Vent dans le musée, nouvelles, éd. Alpha, Alger 2006 ; Une enfance dans le M'zab, nouvelles, éd. Alpha, 2008 ; Une Femme dans les affaires, éd. El Othmania, Alger, 2009 ; Le Terroriste, roman, éd. Mille-Feuilles, Alger, 2009. L'ensemble des personnes qui l'ont approché de son vivant gardent de lui le souvenir d'un homme modeste. Pour le professeur de philosophie et journaliste, Mohamed Bouhamidi, le défunt Abderrahmane Zakad fut un moudjahid, urbaniste, voyageur ayant vécu de multiples vies. «Il était, témoigne-t-il, généreux, volubile, passionné, malheureux de certaines choses et tendu vers ce qu'il faut faire pour changer les choses. Il a plus vécu ses rêves qu'il ne s'est rêvé une vie. Il a écrit une dizaine de romans, quatre ou cinq recueils de poèmes, plusieurs récits et contes pour les jeunes et les enfants. Il a essayé d'y mettre sa sympathie pour le monde, son amour des gens, son désir de réformes et de transformations sociales. Il fut ingénu au point de croire à l'effet de la conscience sur les conduites politiques et sociales». Pour la directrice des éditions El Ibriz, Samira Bendriss, le départ de cet homme hors du commun l'a beaucoup touchée, d'autant plus qu'elle ne le savait pas malade. «On échangeait, dit-elle, souvent des messages par mail et au téléphone. On se voyait à l'occasion de rencontres littéraires. Il aimait beaucoup assister à ce genre de rencontres, surtout prendre la parole pour ne plus la rendre. Il fallait souvent lui arracher le micro, car il voulait toujours en dire plus... Cela nous agaçait parfois, mais nous savions tous que souvent il avait raison de dénoncer ces abus ou ces excès ‘‘de piston'' comme il aimait les appeler... mais plus important que cela restent ses écrits, ses poèmes et ses SOS quant au danger qui guette notre ‘‘cité'', car c'était avant tout un urbaniste qui avait peur de cette ‘‘clochardisation'', ‘‘ghettoïsation'' et surtout de cette irresponsabilité du citoyen qui ne s'investit pas dans sa ‘‘citoyenneté'', car il se voit ‘‘marginalisé par tous les projets de réhabilitation'' ou ‘‘non-associé au plan de construction''».