Dans le grand pays des prisons, deux affaires viennent de se croiser, liées entre elles par le même principe. L'une concerne Slimane Bouhafs, qui vient d'être condamné à 5 ans de prison ferme et 100 000 DA d'amende. L'autre concerne Mohamed Talmat, qui vient de voir confirmée sa peine de deux ans de prison ferme et 200 000 DA d'amende. Pour Slimane, il s'agit d'offense au Prophète Mohamed, et pour Mohamed, il s'agit d'offense au Président Abdelaziz, Bouteflika de son nom de famille. Le premier a été arrêté en vertu de l'article 144 bis du code pénal, le second en vertu de l'article 144 bis 2. Mais que dit exactement ce fameux article 144 avec son bis, son bis 2 et qui met en prison tant de monde ? Le 144 bis dit qu'est «punie d'une amende de 100 000 da à 500 000 da toute personne qui offense le président de la République». Le 144 bis 2 dit qu'est «puni d'un emprisonnement de trois ans à cinq ans et d'une amende de 50 000 à 100 000 da quiconque offense le Prophète». Dans le cas de l'offense à Président, aucune peine de prison n'est donc prévue par la loi et on peut se demander pourquoi Talmat est emprisonné. Mais surtout, pour les rédacteurs du code pénal, il est deux à cinq moins grave d'offenser le Prophète (50 000 à 100 000 da d'amende) que d'offenser le Président (100 000 à 500 000 da). Quand on offense le Prophète, on risque une peine de prison plus lourde que si on offense le Président, même si aucune peine de prison n'est prévue pour le second cas, mais on paye une amende plus faible, 100 000 DA pour Bouhafs, 200 000 DA pour Talmat. Ce qui signifie ? Justement, si on dit que les juristes ont plus peur du Président que du Prophète, tout est prévu, l'article 144 dit que quiconque offense un magistrat est puni de deux mois à deux ans de prison et de 1000 à 500 000 DA d'amende. C'est ce qu'on appelle une vis sans fin, où la vis est solidaire de l'axe qui la supporte. Toute personne contestant le code pénal sera punie par le code pénal.